En novembre 2005, j’ouvrais le blog « Mezetulle » en pleine période de violences urbaines. Je republie ci-dessous l’article qui leur était consacré. Dix-huit ans plus tard, et alors que les violences n’ont fait que croître en intensité et en extension territoriale, qu’elles s’inscrivent dans une série d’exactions criminelles et d’attentats séparatistes revendiquant la haine de la France et des institutions républicaines, je le juge encore trop « bisounours », émaillé de bienpensances et de génuflexions. J’y ai inséré plusieurs notes, datées, qui signalent quelques décalages avec le moment présent.
Aujourd’hui il apparaît clairement que les causes générales1 et profondes des graves désordres – dont certains s’apparentent à des actes de guerre2 – ont un faible rapport avec un dénuement social3. Aujourd’hui plus que jamais il est clair que nous avons affaire à des casseurs de haute intensité qui n’ont rien de « populaire ». L’abandon dont sont « victimes » les jeunes voyous assoiffés de satisfactions immédiates est celui de l’interdit civilisateur que ni leurs aînés ni l’école n’ont été capables de leur imposer quand ils y étaient encore accessibles4.
Mais, au-delà de l’analyse présentée dans le texte de 2005 dont on peut reprendre les grandes lignes en les accentuant, demeurent sa thèse (ce n’est pas un mouvement populaire) et sa ligne politique (diviser afin d’isoler les casseurs).
Toute comparaison avec un mouvement populaire est impertinente, les casseurs sont les ennemis du peuple dont ils détruisent délibérément la sécurité, la liberté et la seule richesse (les services publics – ou ce qu’il en reste car les services publics sont la cible depuis des décennies d’autres « casseurs » très civilisés en col blanc). Il convient donc de résister aux tentatives lénifiantes d’« unification » comme celles que tentent aujourd’hui la France insoumise, divers mouvements « de gauche », EELV, ainsi que les plus politiques des islamistes. Il convient de souligner et de renforcer la distinction entre les casseurs et le peuple afin que les casseurs ne se sentent « nulle part comme un poisson dans l’eau ». À cet effet, la force publique est indispensable et il est nécessaire de la soutenir, mais ce n’est pas suffisant. Un point de rupture est franchi duquel aucun citoyen ne peut se détourner en se contentant d’appeler gentiment à un « retour au calme » qui passerait l’éponge sur les discours victimaires culpabilisants et sur la culture de l’excuse en rouvrant la boîte à subventions – autant d’encouragements pour les casseurs.
Car il n’y aura pas de « retour ». On ne peut plus parler de territoires perdus sous forme de « zones ». Tous les territoires sont perdus dès qu’ils sont à tout moment susceptibles d’être conquis par la barbarie. Certains pourront penser peut-être à se protéger par une contre-barbarie locale, mais c’est le même danger. L’émiettement féodal – encouragé par une Europe qui ne répugne pas à prospérer sur la dissolution des nations – risque de resurgir sur les ruines du modèle républicain que nous n’osons pas défendre, faute de volonté politique pour réarmer ou restaurer celles des fonctions essentielles de l’État qui ont été le plus abîmées ou détruites : police, justice, instruction publique, contrôle des flux migratoires, monopole de l’énergie, santé publique5. La paix républicaine n’est pas un calme passif, lequel ne peut être perçu que comme une proie ou un terrain de jeux : c’est le fruit de l’effort civique que chaque citoyen, à son niveau et selon ses moyens, est appelé désormais à fournir, y compris en s’éloignant des forces politiques auxquelles il avait cru naguère pouvoir s’en remettre.
Texte publié en 20056 avec des notes ajoutées en 2023
Masqués7, nocturnes, masculins, armés, ravageurs, homicides, aphasiques. Non, ce n’est pas une troupe de l’ombre sortie des enfers dans un film catastrophe qui répond à cette liste de qualificatifs, mais un déplorable réel. Décrire ainsi les casseurs qui sévissent depuis maintes nuits n’est sans doute pas politiquement correct, mais même si on peut allonger la liste, comme on allonge un amer avec de l’eau, aucune accumulation de diluants (adolescents, égarés, désoeuvrés, désespérés, assoiffés et privés de consommation) ne peut atténuer ni invalider l’horreur qu’elle véhicule.
Confondre cette horreur avec ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à une population n’est pas seulement une sottise, c’est une faute morale et politique. C’est pourtant ce que font, avec des mots infâmes, quelques irresponsables : au lieu de traiter cette barbarie comme une excroissance, ils l’érigent en noyau et en normalité, ils en font une sinistre avant-garde autour de laquelle ils tissent un peuple fantasmatique qui exaspère la population réelle.
Tout ce qui solidarise les casseurs avec la population qui les entoure est inique et dangereux. Cette coalisation s’effectue par des opérateurs d’identification : les mots infâmes, les « gros mots »8. Ils émanent de deux sources. Ainsi, émanant de la source répressive, le mot « racaille » stigmatise et cimente tout le monde : gros mot de droite. Mais le mot « jeunes », émanant de la source bien pensante compassionnelle, blanchit tout le monde – qu’on ajoute « défavorisés » et voici les casseurs promus en héros : gros mots bien-pensants.
Il importe au contraire de souligner la division entre le peuple et les casseurs, de refuser le processus d’identification. C’est pourquoi le vocabulaire juridique est encore le meilleur : il qualifie sans créer de substances, il émiette, isole et ne construit pas de conglomérats. Il faut donc parler de délinquants, de tentatives de meurtre, d’atteintes graves à l’ordre public et à la sécurité, de mise en danger de la vie d’autrui, de destruction systématique de biens et d’équipements publics et privés9. Il faut diviser, et pour diviser les mots discriminants doivent l’emporter sur la glu des gros mots.
Il faut que les casseurs ne se sentent nulle part « comme des poissons dans l’eau ».
Aussi toute comparaison, même rhétorique, avec un mouvement populaire ou même une révolte, est elle-même inique. Un mouvement populaire peut être violent, mais personne dans le peuple n’en craint la violence car elle s’exprime toujours dans un cadre, dans un « service d’ordre ». Un mouvement populaire s’attache à créer des solidarités qui ne reposent ni sur des lieux ni sur des identifications substantielles (d’ethnie, de religion, de sexe, d’âge) mais sur des analyses et des revendications claires, exprimées dans la langue commune à tous. Il s’adresse à des interlocuteurs désignés ; il s’expose et s’affiche en plein jour, à visage découvert, dans le centre des villes10. Il se déplace pour témoigner, il se « dépayse ». Il réunit hommes et femmes, jeunes et vieux. Or ici nous avons l’aphasie, le repli sur des territoires considérés comme des chasses gardées11, l’obscurité, l’exclusivité masculine12. Le terme « émeute » n’est même pas approprié, ce sont des explosions muettes qui prennent la forme de la barbarie et qui s’avancent masquées.
Tout a été dit sur les causes sociales de ces explosions : toutes choses justes auxquelles on ne peut que souscrire13. Il faut cependant ajouter que la forme barbare suppose aussi des causes de type culturel, surtout lorsqu’elle s’empare de pré-adolescents (on en a eu un avant-goût avec les incidents qui ont émaillé les manifestation lycéennes l’hiver dernier). La forme barbare, c’est l’aphasie, c’est l’habileté à utiliser les technologies disponibles, c’est l’absence de tout interdit, c’est l’état de nature plus la profusion des moyens (téléphones mobiles, cocktails molotov, armes), c’est l’usage des techniques sans la civilisation.
Une civilisation suppose non pas une culture uniforme, mais s’articule en régimes culturels à l’intérieur desquels peuvent se développer des contre-cultures de façon pas nécessairement licite mais toujours organisée et réflexive. Or nous avons assisté durant les 30 dernières années, avec l’effondrement des partis ouvriers et la régression des syndicats de revendication, à la disparition de la culture populaire. Les adolescents n’ont aucun modèle populaire qui peut les nourrir, qu’ils peuvent discuter. En dehors des clips télévisés où se déploie le culte de l’argent et de la vie faciles, en dehors de la « glisse », des fringues et des incantations islamistes, rien qui puisse se présenter comme digne d’imitation – et surtout pas l’école où une politique constante depuis 30 ans s’acharne à dépouiller les enseignants de toute autorité, de tout prestige.
Le poignant appel des femmes qui circule ces jours-ci, au-delà de son aspect pathétique, l’avoue naïvement : « nous exigeons que nos enfants rentrent à la maison ! » disent-elles. Mais comment ceux de qui on n’a jamais rien exigé lorsqu’ils avaient l’âge d’intérioriser un interdit, comment ceux qui n’ont appris qu’à se conduire en caïds vis à vis de leurs « vieux » et de leurs soeurs pourraient-ils obtempérer à une exigence aussi tardive et dérisoire ?
Ce n’est pas le modèle républicain d’intégration qui est ici en panne14 mais tout simplement la volonté et le simple courage d’éduquer. On ne voit pas du reste que cette fureur s’étende à tous ceux qui dans les « quartiers » souffrent de discrimination, d’exclusion, de pauvreté. On ne voit pas non plus qu’elle saisisse les filles15, tout aussi – sinon plus – « défavorisées », pas plus que les « jeunes » issus de vagues migratoires pourtant plus récentes, venant notamment d’Asie.
Sans doute certaines zones urbaines sont-elles livrées au communautarisme intégriste, mais elles sont aussi le territoire de bandes maffieuses développant ce qu’on appelle par euphémisme des « économies parallèles », trafics et rackets en tous genres. Alors « à qui profite le crime? » : à un véritable modèle de terreur dont l’infrastructure est le trafic et dont la superstructure est tenue par l’intégrisme. C’est l’alliance des ayatollahs et des dealers qui se déchiffre dans le seul message sans paroles, mais clair, envoyé par les casseurs : « la police, l’école, les pompiers, les bus, les médecins, les crèches, les hôpitaux, les magasins16, les entreprises, on n’en veut pas ; on veut être chez nous, laissez-nous trafiquer, opprimer, terroriser comme bon nous semble et tenez-vous à l’écart, n’entrez pas »17.
Notes
1– Je ne me sens pas autorisée à commenter l’occasion qui a déclenché les violences de ces derniers jours : personne ne peut rester indifférent à la mort d’un jeune homme lors d’un contrôle de police, fût-il un délinquant ; personne n’a le droit de décider, avant enquête et surtout jugement, que le policier auteur du coup de feu mortel s’est conduit délibérément en meurtrier. Le président de la République, en déclarant immédiatement ce geste « inexcusable » (« «Nous avons un adolescent qui a été tué, c’est inexplicable, inexcusable.» 28 juin, Marseille), s’est permis de piétiner la distinction des pouvoirs.
2– On se contentera de citer l’attaque du domicile du maire de l’Haÿ les Roses à la voiture-bélier enflammée dans la nuit du 1er au 2 juillet https://www.lefigaro.fr/politique/emeutes-apres-la-mort-de-nahel-le-domicile-du-maire-de-l-hay-les-roses-vise-par-une-voiture-en-feu-sa-femme-hospitalisee-20230702 , et les appels au meurtre entendus à Sannois le 29 juin – voir un bref sommaire sur BFM TV https://www.dailymotion.com/video/x8m802o
3– David Lisnard, président de l’AMF (Association des maires de France) faisait remarquer le 3 juillet sur Europe 1, à propos des politiques de la ville, que « les violences ont été presque proportionnelles à l’argent injecté » https://www.europe1.fr/emissions/L-interview-de-7h40/attaque-chez-le-maire-de-lhay-les-roses-on-ne-peut-pas-baisser-les-bras-confie-david-lisnard-4192133 . Sur un autre plan, on lira avec intérêt l’article d’Olivier Galland dans Télos (1er juillet) « Les ingrédients des émeutes de 2005 sont toujours là » https://www.telos-eu.com/fr/les-ingredients-des-emeutes-de-2005-sont-toujours-.html
4– Voir l’analyse de Iannis Roder « Nous payons aujourd’hui une absence générale d’autorité » https://www.lexpress.fr/societe/education/iannis-roder-nous-payons-aujourdhui-une-absence-generale-dautorite-STHKV573IVFG5GD2QEGS2ZWPKQ/
5– L’armée a été replacée dans le champ de vision par la guerre en Ukraine.
6– Toujours accessible en ligne sur le blog d’archives Mezetulle http://www.mezetulle.net/article-1254249.html publié aussi dans Marianne n° 448 du 19 nov. 2005, p. 30-31.
7– [2023] Voir infra note 10.
8– [Note de 2005] Jean-Claude Milner, Les Noms indistincts, Paris, Seuil, 1983.
– [Ajout de 2023] Je prenais mes distances avec le mot « racaille », utilisé notoirement par Nicolas Sarkozy, et pensant, comme je le dis dans le texte, qu’il amalgame grossièrement l’ensemble des résidents des banlieues, réalisant ainsi une coalition qu’il importe de briser – il faudrait donc réserver le terme de « racaille » à ceux que j’appelle ici « casseurs ». On doit toujours avoir à l’esprit que nombre de ces résidents, notamment des jeunes élèves, travaillent, respectent les lois, mais ne peuvent le faire sans contradiction et sans subir le poids très violent du communautarisme ; comme le dit Iannis Roder (voir texte cité note 4) « Beaucoup font des études, trouvent un travail mais finissent aussi par quitter ces quartiers. Notamment ceux qui ont grandi dans des cités qui sont des lieux où une contre-société, avec parfois une d’économie parallèle, a fini par s’installer, sans parler des normes religieuses et culturelles qui pèsent essentiellement sur les filles. S’ils veulent sortir de ce fonctionnement un peu tribal et s’émanciper, il leur faut partir. C’est ce qu’ont fait beaucoup de mes anciens élèves. Ceux qui restent se maintiennent, parfois malgré eux, dans ce fonctionnement très sclérosé et fermé. » .
9– [2023] J’ajoute : tentatives de meurtre et d’assassinat, pillages.
10– [2023] Ceci n’est plus vrai. 1° Les casseurs s’exposent de manière très voyante sans crainte d’être identifiés, avec la quasi-certitude de ne pas être punis – beaucoup d’entre eux sont mineurs, et la plupart agissent manifestement en émulation, par rivalité avec d’autres casseurs, c’est à qui sera le plus violent, le plus ostensible. 2° Le centre des villes non seulement n’est pas épargné mais est devenu un objectif, notamment dans les actes de pillage : autant de fonds d’écran prestigieux qui s’affichent sur les réseaux sociaux.
11– [2023] Phrase bien rassurante – le mythe du repli – qu’il faudrait récrire : il n’est pas un point du territoire national qui soit aujourd’hui hors d’atteinte par sa nature, à moins d’être lui-même contrôlé par une bande plus puissante capable d’en imposer aux casseurs brouillons, mais qui adopterait, en fait, le même fonctionnement.
12– [2023] Les femmes ne répugnent pas à participer activement aux pillages. Elles sont toujours extrêmement minoritaires dans les attaques violentes ayant pour but des destructions lourdes et employant des armes. Les agents de ces attaques semblent plutôt fonctionner à l’adrénaline et faire appel au code de l’honneur d’une « masculinité toxique » – étrangement, les néoféministes intersectionnelles semblent ne pas s’en rendre compte…
13– [2023] On pouvait peut-être encore y souscrire en 2005. Est-ce le cas en 2023 ? Voir la note 3.
14– [2023] Il a été mis délibérément en panne notamment par une politique de destruction de l’école publique et par un discours culpabilisateur qui s’acharne à répandre la détestation de la France. C’était déjà le cas en 2005.
15– [2023] Là encore, le discours victimaire d’intimidation séparatiste a fait des « progrès » depuis 2005, mesurables notamment par l’extension du port du voile.
16 – [2023] Le commerce en tant qu’affichage de l’ascension sociale et que marqueur d’intégration. Mais les magasins à piller sont tout de même bons à prendre… tant qu’ils sont approvisionnés.
17– [2023] Peut-on raisonner encore en termes de « zones » qui seraient relativement étanches ? Je pensais en 2005 que ce morcellement était un des derniers degrés de l’effondrement de la cité. On voit aujourd’hui que cela peut aller plus bas encore. Les casseurs ne disent pas « n’entrez pas », mais « nous entrons là où vous avez encore l’illusion de vous croire chez vous : tout est à nous ». Cf supra note 11.
Bonjour,
Sur le même sujet:
Un article, contenant du factuel.
https://politicoboy.substack.com/p/lensauvagement-de-la-france?token=eyJ1c2VyX2lkIjoxMzU2MDcwNDEsInBvc3RfaWQiOjEzMzk1MzEzNiwiaWF0IjoxNjg4ODkxMTU1LCJleHAiOjE2OTE0ODMxNTUsImlzcyI6InB1Yi01MTEwNDQiLCJzdWIiOiJwb3N0LXJlYWN0aW9uIn0.UDWBhgY9LRaLnkr7qAXo0AiimidmgRnwKIxYOIeW8c4&utm_source=substack&utm_medium=email
Le texte-fleuve vers lequel conduit le lien dans le commentaire qui précède est instructif d’abord dans sa défense et illustration (prétendue « factuelle ») des émeutiers dont il faudrait entendre l’appel au secours, le « cri d’alarme » : car c’est bien sûr « la bourgeoisie » qui s’ensauvage…
On apprend notamment que « pour beaucoup de gens, les locaux associatifs, mairies et écoles représentent davantage une forme de violence institutionnelle et administrative doublée d’un lieu de tri social qu’une oasis ». Surtout l’école que « quelque [sic] soit leur milieu », les enfants ne portent pas dans leur coeur ! et puis, dans le même alinéa, (c’est moi qui souligne) « la décision du gouvernement de suspendre les transports en commun desservant les banlieues à 21h pour cantonner les manifestants dans leur quartier a certainement contribué à ce mouvement autodestructeur » – tiens c’est autodesctructeur de s’en prendre à des institutions aussi violentes que les mairies, les écoles et les locaux associatifs ?
L’attaque du domicile d’un maire avec une voiture-bélier enflammée ? il s’agit probablement d’un règlement de comptes « perpétué [sic] par le crime organisé ». Donc c’est marginal et ça n’a « rien à voir avec les émeutes ». Circulez, il n’y a rien à voir.
La longue litanie de « faits » accumule ainsi outrances, mauvaise foi, contradictions, hors-sujets.
Mais le texte est instructif ensuite et surtout pour son caractère politique.
Il ne s’agit pas tant d’une appartenance évidente et revendiquée par l’auteur, attestée notamment par la reprise de propositions connues – abrogation de la loi « permis de tuer », refonte de l’IGPN et « dissolution de la Police [sic] pour la refonder en profondeur ».
Ce texte n’est pas seulement une énième occurrence de l’inversion victimaire, il déplore l’échec d’un projet politique et donc révèle en creux celui-ci. Au-delà de ses outrances et de sa mauvaise foi, au-delà même de ses contradictions, je l’ai trouvé intéressant pour cette raison. En ce sens, il peut effectivement être lu comme un commentaire de mon propre article dont il partage, en l’inversant, le dispositif d’analyse politique relatif à l’union et à la division.
La phrase suivante, en écho inversé au texte que j’ai publié ci-dessus, exprime très bien le dépit de n’avoir pas suscité l’union bienpensante et intimidante autour des casseurs « victimes » :
« Après avoir tenté l’apaisement en témoignant une certaine empathie, le gouvernement a rapidement pivoté vers une réponse exclusivement sécuritaire et répressive. »
Eh oui, l’auteur a raison : Macron avait dans un premier temps exprimé son penchant habituel pour l' »empathie » avec son cortège de discours victimaires et culpabilisateurs fédérés par le mot magique « apaisement » (autre nom ici de l’achat de la paix sociale). On s’apaise, on se tait, on écoute les gentils casseurs, on les chouchoute. Tout aurait pu continuer comme avant, la boîte à subventions largement ouverte, avec en plus l’alibi fortement dramatisé du « cri d’alarme » et du chantage à la violence (celle qu’on produit délibérément, motivée et excusée par celle qu’on est censé subir).
Mais c’est raté : girouette ultra-sensible à l' »image » et aussi aux sondages d’opinion, le président a vite « pivoté », probablement à contrecoeur. Les casseurs n’ont pas seulement cassé et incendié des bâtiments et des équipements collectifs, ils n’ont pas seulement pillé, ils n’ont pas seulement piétiné les services publics, ils n’ont pas seulement perpétré ouvertement des tentatives de meurtre, ils ont ce faisant pulvérisé la stratégie politique « pacifique » d’une pseudo-gauche qui se nourrit de clientélisme misérabiliste et communautariste.
Et, à la différence de l’auteur, je me félicite que cette coalition honteuse autour des casseurs, dictée par la féroce voix de l’humilité vicieuse, soit ratée et qu’ils ne soient nulle part comme des poissons dans l’eau.
Pour combien de temps ?
Bonjour C.Kintzler
J ‘adhére totalement à vos propos.Les zones de non-droit sont de plus en plus fréquentes ,encouragées par des propos bislounours béats et soit disant compréhensifs et ouverts. Le droit disparait de nos societes.Le civisme aussi. La faute à cet effacement de tout ce qui fait la république: suppression des palais de justice dans les zones moins urbanisées, suppression de la police de proximité, abandon progrressif de l’instruction civique, abandon des regles elementakres de la langue(orthographe grammaire) , de la valeur de l’ecrit et de la reflexion détrônés par l’immédiateté et le sensationnel qui règnent au travers des réseaux sociaux.
Il nous faut tous réagir. Militons pour la mise en avant de ces jeunes (encore majoritaires) qui brillent malgre un environnement dot défavorisé, ces francais d origine « issus de l immigration qui réussissent à représenter les valeurs républicaines (minorités asiatiques notamment)..Enseignons le droit des le collège. Nul n est censé ignorer la loi mais il faut atteindre l’enseignement supérieur pour l’étudier.
Favorisons et revalorisons les filières professionnelles plus courtes (surtoit aupres des parents)qui ne nécessitent pas un bac dévalorisé et qui donnent aux etudiants un ssentiment d’utilité. qui les valorisent.
Nous sommes à un carrefour entre la barbarie et l’extrême droite (favorisée par cette barbarie).Il existe une troisième voie.Celle de la République. de la chose publique.Comportons nous en citoyens .Allons voter mais ne soyons pas des citoyens comète qui ne déclarent présents qu’aux élections.Militons à chaque instant.Faire de la politique ce n’est pas appartenir à un parti politique mais s’occuper quotidiennement de la chose publique la nôtre . L’état c’est nous.
Je reçois ce commentaire de la part de Jean-Michel Muglioni :
******
Pour aller dans le sens du propos de Mezetulle de 2005…
Le ministre de l’Education nationale a annoncé – s’il faut croire les journalistes – que dorénavant les fautes de français et d’orthographe seront sanctionnées au baccalauréat. Je n’ai entendu aucun commentaire, sinon l’opposition d’un syndicat à ce projet. Les sanctions attendront que soit mis en place un enseignement qui prépare les élèves à cette nouvelle notation. Personne n’a félicité le ministre pour son courage : il avoue en effet ainsi que jusqu’ici l’école dont il a la responsabilité n’apprend aux élèves ni l’orthographe ni la langue française. Et il est vrai que ministre depuis peu il n’y est pas pour grand-chose. Depuis la seconde moitié du siècle dernier, ces enseignements ne sont plus tenus pour essentiels. Pourquoi ? Un universitaire de haut rang a proclamé lors de la séance inaugurale de son cours au Collège de France que la langue est fasciste. Proposition qu’on dira sans doute profonde dans son contexte mais dont l’auteur ne pouvait ignorer l’effet dévastateur qu’elle aurait dans l’institution.
Imposer la correction de la langue et l’orthographe, c’est imposer une discipline, le terme de discipline étant donc entendu au sens militaire. C’est ce qui depuis longtemps est banni de l’éducation et de l’instruction. Or sans la dure soumission à des règles on n’apprend rien. On reste étranger à sa propre langue. Qui ne maîtrise pas sa langue ne peut faire de vraies études et ignore ce que c’est que savoir et comprendre. Comment reconnaîtrait-il l’autorité du maître en tant qu’il sait ? Et pourquoi distinguerait-il l’autorité de la loi et l’arbitraire d’un despote ? Une fois au travail pour gagner sa vie, sera-t-il en mesure de supporter la peine inhérente à tout travail ? Pourra-t-il distinguer cette peine de celle qui vient d’une mauvaise organisation du travail ? Une fois accoutumé chez soi et à l’école à vivre sans règles, le moindre obstacle décourage ou révolte. Toute règle et toute nécessité extérieure ne peuvent alors être vécues que comme une injustice, comme l’expression de la mauvaise volonté d’autrui et de la société.
Chère Catherine Kintzler
J’ai beaucoup apprécié votre analyse des événements récents et je vous en remercie.
Mon épouse a remarqué une chose dont je n’avais pas conscience : outre la destruction des « symboles du pouvoir » (mairies, commissariats, écoles même), les destructions ont visé des lieux de socialisation des femmes : crèches, bureaux d’aide sociale, antennes des services « d’aide à domicile », supérettes de proximité, autobus. Tous lieux dont la fermeture oblige les femmes à rester à la maison. Sans crèches, elles sont obligées de garder leurs enfants en bas âge ; sans accès à l’aide sociale (secours populaire), elles ne peuvent plus gérer leur budget ; sans bureaux d’aide à domicile, elles ne peuvent trouver un emploi temporaire ; sans supérette de voisinage, c’est le petit caïd qui ira faire les courses à l’hypermarché ; sans transport en commun, elles ne peuvent plus sortir.
Nous avons vécu quarante ans à Bordeaux dans un quartier relativement « populaire » ; mon épouse avait de nombreux échanges avec des femmes isolées (mais avec enfants) d’origine maghrébine ; elle avait mesuré combien ces femmes étaient désireuses de « sortir ». Tout semble fait dans ces destructions pour les en empêcher. Après la lecture du livre de Florence Bergeaud-Blackler, ne peut-on y voir les conseils discrets des Frères ?
Je serais heureux de savoir si l’analyse (que je partage) de mon épouse vous paraît pertinente…
Merci aussi pour votre analyse du papier de « Politicoboy » et pour le commentaire de M. Schneider !
Très cordialement