Sabine Prokhoris revient avec indignation sur la manière sensationnaliste dont le journal Le Monde a relaté le décès de Vincent Lambert en publiant notamment une tribune de Michel Houellebecq1 – « écrit inutile, dont l’indignité le dispute à la médiocrité ». Dans ce qu’il est convenu d’appeler « l’affaire Vincent Lambert », les déclarations accusatrices au nom de la Vie sont autant d’injonctions à perdre de vue la dignité, la liberté et la singularité.
[N.B. une version abrégée du texte qui suit a été publiée sous forme de tribune par Libération le 17 juillet2]
Vincent Lambert n’était pas mort depuis deux heures que sur le site du Monde paraissait une tribune signée Michel Houellebecq, intitulée « Vincent Lambert mort pour l’exemple »3. Le grand quotidien du soir crut bon de faire du dénouement de ce qui était devenu « l’affaire Vincent Lambert » le gros titre de la une de son édition de l’après-midi : cartouche blanc et majuscules d’imprimerie (LA MORT DE VINCENT LAMBERT), surmontant l’annonce, telle celle d’un match, de deux tribunes placées en vis-à-vis : l’une de Jean Leonetti, la seconde – quelle aubaine ! – de Michel Houellebecq. Le tout dans un encadré bleu du plus bel effet. The show (pardon, le débat) must go on, comprenait-on, à lire le titre sensationnaliste élu avec un indéniable talent publicitaire par la rédaction pour résumer la position du célébrissime challenger de Jean Leonetti (qui n’en demandait sans doute pas tant) : « Fallait-il tuer Vincent Lambert ? » Et un direct dans l’estomac, un. Prends ça, lecteur ! Citation, les guillemets nous en avertissent. Mais le choix de cette phrase-choc accrédite l’idée d’un crime d’État.
Après l’arrêt de la Cour de cassation ouvrant la voie, cette fois sans discussion possible, à l’arrêt des traitements qui entraînerait la mort de Vincent Lambert, le sinistre feuilleton connut encore, on le sait, quelques rebondissements, qu’on aurait pu espérer évitables, n’était l’acharnement des parents Lambert : ouverture le 11 juillet d’une enquête en recherche des causes de la mort diligentée par le procureur de la République de Reims, à la suite des plaintes pour meurtre avec préméditation à l’encontre du docteur Sanchez et du CHU de Reims, puis autopsie. Le procureur précisa qu’il ordonnait cette enquête, extraordinairement violente tant pour Rachel Lambert que pour l’équipe médicale, « au regard du contexte tout particulier » de ce décès. Il insista sur le fait qu’il ne s’agissait pas d’une enquête « pour tentative d’homicide ». Son but : établir pour toutes les parties la « vérité judiciaire » quant à cette mort – au regard de la loi Claeys-Leonetti de 2016 telle qu’elle fut interprétée dans le cas particulier de Vincent Lambert –, en vue d’éviter qu’une plainte ultérieure ne contraigne à une « exhumation » du corps, cela, dit-il, « dans la logique d’un dossier qui n’a épargné personne ». Ainsi le procureur anticipait-il, à demi-mot, que les parents Lambert pourraient se montrer capables de vouloir un jour ou l’autre déterrer leur fils, mus par l’idée fixe de parvenir à faire condamner ses « assassins » présumés. Hypothèse certes glaçante. Mais froide précaution judiciaire peut-être nécessaire.
Et à lire l’article écrit par Michel Houellebecq quelques jours avant la mort attendue de Vincent Lambert, fondant spectaculairement sur cette tragédie avant même que le défunt n’ait eu le temps de refroidir, on se dit que oui, sans doute, l’ignoble reste possible autour de sa dépouille.
Remarquons d’abord, puisque l’alibi de cette publication en fanfare est, on suppose, la nécessité du débat public sur les questions qu’a soulevées ce drame de onze années, que ce texte n’y contribue en rien. Car cet écrit inutile, dont l’indignité le dispute à la médiocrité, n’est en somme qu’une variation de plus dans l’interminable litanie accusatrice des parents Lambert et de leurs soutiens – petit frisson transgressif en prime (l’éloge de la morphine, en potion magique d’Astérix et tout aussi crédible).
« Vincent est mort, tué par raison d’État et par un médecin qui a renoncé à son serment d’Hippocrate […] Il n’aura été tenu aucun compte de la dignité de cet homme handicapé, condamné parce que handicapé. […] C’est un peu de notre humanité à tous qui s’en est allée aujourd’hui, tant cette faute ignoble qui ébranle les fondements de notre droit et de notre civilisation rejaillit sur nous tous », déclarèrent les parents après la mort de leur fils, (ils avaient pourtant fait savoir qu’ils observeraient silence et recueillement). Antienne reprise par l’inusable Christine Boutin : « Prions pour Vincent Lambert […] et demandons la miséricorde pour notre barbarie d’État qui ne laisse plus aucune chance à la Vie ».
Michel Houellebecq ne dit pas autre chose, prière en moins : « Ainsi, l’État français a réussi à faire ce à quoi s’acharnait, depuis des années, la plus grande partie de sa famille : tuer Vincent Lambert. » La suite, d’une prose volontiers ordurière, est à l’avenant : de mèche avec une épouse criminelle et des médecins douteux, l’État, en la personne d’Agnès Buzyn – dont il n’est pas inutile de rappeler ici que le père fut un survivant de la Shoah –, a pour machiavélique projet de liquider les handicapés. Ça vous rappelle quelque chose ? Euthanazie en somme, mais juste insinué. Et pourquoi ? Parce qu’ils coûtent « un pognon de dingue »… D’où cette exécution « pour l’exemple ». Ou comment rendre les citoyens obéissants.
Notre Sage poursuit, expliquant que « personne n’a envie de mourir ».
L’écrivain sait l’usage des mots. Donc sait user du sophisme. Est-il question dans ce débat sur les conditions de la fin de vie d’avoir « envie » de mourir ? Ou d’avoir la liberté de décider de mourir ? La dignité, ce concept « vaseux », la dignité d’une vie humaine – autre chose que la vie tout court –, réside précisément dans le respect de cette liberté, qu’il appartient au droit de protéger. C’est un combat d’aujourd’hui, comme le fut et l’est encore celui pour la liberté de choisir de donner ou de ne pas donner la vie.
L’écrivain devrait aussi savoir qu’on n’atteint aucune vérité par des généralités. Il nous en sert pourtant à la pelle, de ces poncifs, évoquant sans rire «« l’état des mentalités », depuis quelques millénaires tout du moins ». Formule du niveau d’une mauvaise copie de terminale, qui témoigne en tout cas d’une confondante méconnaissance de la réalité d’innombrables expériences singulières. Celle de Vincent et Rachel Lambert en est une, spécifique. Cette singularité est précisément ce qui nous touche et nous donne à penser.
Le Monde a tristement perdu cela de vue.
Notes
1 – Le Monde 11 juillet 2019, en ligne https://www.lemonde.fr/sante/article/2019/07/11/michel-houellebecq-vincent-lambert-mort-pour-l-exemple_5488006_1651302.html .
2 – Libération daté du 17 juillet « Vincent Lambert : l’épitaphe ratée de Michel Houellebecq » https://www.liberation.fr/debats/2019/07/17/vincent-lambert-l-epitaphe-ratee-de-michel-houellebecq_1740591 . On lira aussi, dans le même quotidien, la chronique de Sabine Prokhoris datée du 6 juin « Les combats douteux des parents Lambert » https://www.liberation.fr/debats/2019/06/06/les-combats-douteux-des-parents-lambert_1732178
3 – Les articles sont accessibles en ligne pour les abonnés (voir la référence à la note 1)..
Merci Madame, je me sens moins seul dans mes analyses et mes perceptions de ce « personnage ».
Depuis mes lectures de ses trois premiers ouvrages (après j’ai arrêté tant cela me rendait malade…), j’ai toujours pensé que cet « écrivain » n’avait pas de fond, disait n’importe quoi et surtout développait une forme de pensée très perverse.
Mais ce n’était que mes perceptions et mes analyses que j’ai cependant défendues (dissertation à l’appui de ses propos) face à des cohortes d’aficionados inconditionnels qui voient du génie en lui. Même si certains ont pu admettre que tout bien considéré, oui, il dit n’importe quoi, je n’ai cependant jamais réussi à les détourner de leur fascination morbide.
Ce qui reste une interrogation pour moi, c’est le phénomène sociologique et psychologique (mondial) qu’il représente à lui seul. Comment des gens sensés (dont des amis et amies proches) et une grande majorité de lecteurs peuvent-ils à ce point être aveugles au poison psychique que cet usurpateur de la pensée distille en permanence ?
C’est ça le vrai drame avec ce personnage et surtout de notre société qui adore les « prophètes de la pourriture ». Je le perçois comme un un avatar de plus de ce que Debord a si bien décrit dans « La société du spectacle » en annonçant (dès 1967) comment une fausse pensée deviendrait « vraie ».
Heureusement, il y a encore des gens qui comprennent ce qu’ils lisent et qui veillent à rétablir une pensée juste, comme vous et d’autres intervenants sur ce blog salutaire.
Bien cordialement.
Merci à l’amie Mezetulle de cette publication qui fait du bien.
« Le Monde » était devenu un canard bigot libéral insupportable et j’ai cessé depuis quelques temps déjà de leur offrir mes deux euros et plus quotidiens… Pourquoi financer une telle engeance ?
Maintenant il rejoint la presse de caniveau… Belle évolution !
Il s’y trouve en belle compagnie avec Médiapart qui occupe lui le côté bouche d’égout dudit caniveau… ce dernier vient de le montrer en liquidant avec un dossier quasi vide le sieur De Rugy comme l’établissent les rapports, sérieux eux, qui tombent ce jour. Les rapports n’ont pu que constater le vide des preuves des allégations accusatoires de Médiapart oscillant entre approximations, inexactitudes et mensonges…
Nous sommes mal barrés avec une « démocratie » médiatique aussi peu vertueuse où l’ignoble le dispute au barbare.
Qui accepterait une justice qui fonctionnerait selon les canons du procès médiatique à mille lieues des exigences du « procès équitable » ?
Une justice médiatique, si je résume, où les procureurs sont aussi les juges, où ils se dispensent de produire leurs preuves, où la défense est bâillonnée ou rendue inaudible, où les défaites des procureurs/juges médiatiques sont soigneusement reléguées en page huit ou dix en trois lignes lorsque de vrais juges sanctionnent ceux qui ont jeté à tort l’honneur de certains aux chiens et eux, of course, en première page et gros titres…
Pour paraphraser le bon Clémenceau la « justice » médiatique est à la justice ce que la musique militaire est à la musique… j’ajouterai en pire.
Mais le sujet est trop grave pour ne se prêter qu’à la blague, même excellente du père Clémenceau. Aussi je renvoie à un article de fond sur cette tare contemporaine de nos démocraties d’opinion co-écrit avec deux amis respectivement magistrat et avocat.
Il n’avait déjà pas pris une ride par les temps qui courent mais, là, Médiapart et Le Monde lui donnent chaque jour ou presque le bain de Jouvence…
http://www.slate.fr/story/105077/medias-proces-equitable
Belle lecture pour celles et ceux que cela intéresse !
Merci beaucoup pour le lien que vous donnez sur ce très utile article au sujet des tribunaux médiatiques, pour le moins expéditifs – c’est peu de le dire.
Ce qui m’a choqué dans le clan des parents de Vincent Lambert : l’agressivité, la vulgarité. « On a gagné », la « remontada ». Les parents souriants après un jugement en leur faveur, ils auraient pu se déclarer satisfaits, mais comment l’état de leur fils pouvait les amener à sourire, à se réjouir ?
Après 18 ans , on peut devenir soldat, médecin, électricienne, et simplement conduire un véhicule…Ce sont des responsabilités, mais, en étant lucide, on ne peut pas décider de finir sa vie, en cas de maladie ou de handicap ! Il faut inciter chacun, même jeune, à remplir les directives anticipées, documents disponibles sur un site gouvernemental. Pour Vincent Lambert, cela aurait pu éviter cet acharnement ; on peut souligner la modération et la discrétion de Rachel Lambert et de ses soutiens
Je ne vois pas ce qui peut déclencher dans la prose de Houellebecq une telle ire. Evidemment quand on rencontre enfin une opposition laïque à l’euthanasie le regard est différent. « Les mêmes incantations , la prière en moins ! » lit on dans Libération mais cette différenciation est capitale .
Sorti du diktat de textes révélés où l’ineptie rivalise avec la contradiction, il reste une argumentation séculière traitée par-dessus la jambe si ce n’est totalement évacuée par tous ses détracteurs .
Vincent Lambert n’ avait laissé aucune consigne Comment parler alors de liberté de mourir ou non puisqu’aucun choix n’a été respecté ? Au demeurant liberté érigée comme seule représentante de la dignité en ce qui concerne la vie. Fi des bidonvilles, des prisons , des camps de rétentions voire de bon nombre de manufactures . Il serait désormais inopportun de parler de cette notion dans ces endroits dont la liste n’est d’ailleurs pas exhaustive. Le concept est d’ailleurs d’une versatilité édifiante qui fait que le qualificatif de « vaseux » ne me choque pas le moins du monde. Il y a déjà quelques années , n’avais je pas entendu de la part d’un de nos brillants et aventureux entrepreneurs parti faire suer le sari aux indes, de la dignité des travailleurs du cru, jamais plaintifs et bien sur jamais en grève, acceptant « dignement » les quelques roupies leur permettant de vivre à dix dans cinq mètres carrés après avoir travaillé douze heures dans une usine menaçant de s’effondrer à tout instant .L’ indignité se logerait ainsi dans le camp de la révolte et la décence dans celui de la résignation (de l’obéissance comme le pressent Houellebecq) Et je crains que la disgrâce ne plane sur ceux qui auraient fait l’autre choix : celui de vivre.
J’ai supporté l’agonie cancéreuse de mon père qui l’avait fait, ce choix : celui de s’accrocher jusqu’au bout ; Il avait ingéré cette vérité, que d’aucun qualifieront de générale mais que moi je juge irrévocable et indiscutable : il n’y a que les vivants qui guérissent. Le plus indigne et le plus lâche dans cette affaire c’était moi qui espérait ne pas le voir se relever de sa sieste pour que s’interrompe le calvaire. J’avais oublié ce cousin dont le fils avait déjà choisi le cercueil et qui est rentré chez lui à Bordeaux dans sa propre voiture depuis l’institut Curie , cette voisine dont le médecin avait prévenu toute sa famille de l’imminence du trépas , et qui est allé ouvrir la porte à neveux, enfants et petits enfants en leur demandant s’il y avait beaucoup de monde à son enterrement .
Je reprends donc ce que dit Houellebecq d’une autre façon. Si nous nous trouvons un jour dans l’état de Vincent Lambert ou dans une situation similaire, c’est par l’incurie de la médecine, et de cette même incompétence , chacun de nous peut tirer un fol espoir pour soi ou pour ses proches. Ce que tous les gogos défilant à Lourdes appellent miracles ne sont que les lacunes d’une science balbutiante. Je me souviens également des paroles de ce chirurgien après la mort de mon voisin qu’il avait opéré avec succès l’avant-veille et qui avait succombé à une attaque bien qu’ayant retrouvé le plein usage de sa personne « Nous sommes de grands ignorants !»
Toutes ces considérations mises à part, je me suis souvent demandé de quelle façon j’aimerais ( ou plutôt je préfèrerais mourir) Sans m’en apercevoir en plein milieu d’un rêve, comme le souhaitais Jean Ferrat debout face au soleil la bouche pleine de groseilles, comme le Vieux Camulogène à soixante dix ans glaive en main sur le champ de bataille, et parfois dans des accès de déviance paillarde comme notre bon président Felix Faure
Comme toutes ces faveurs ont toutes les chances d e m’être refusées, je plébisciterai comme Marcel Pagnol dans la bouche de César » Une laide vie plutôt qu’une belle mort !» Et même j’appuierai cette attitude peu glorieuse en préférant ne pas mourir du tout si en plus des funérailles d’antan m’étaient déniées.
Je me refuse quoiqu’il en soit de qualifier ces fins de dignes .Notre humble condition de mortel , les réduisant de toutes façons au rang de pis-aller. Je ne vois d’ailleurs pas ce que la mort a à voir avec cet épithète
Mais Sabine Prohakis nous vend sous le glorieux étendard de la liberté un choix encore plus piètre. Et qui plus est le range aux côtés de nos épiques combats modernes, droit à l’avortement , au mariage pour tous à la procréation assistée etc…
Mais depuis quand n’avons nous pas le droit de nous suicider ?Même quand elles étaient religieusement formelles, aucune loi ne peut rattraper le contrevenant, et pour cause !Reste le cas , extrêmement rare d’être en incapacité matérielle de le faire, il faut l’avouer .
Mais là encore je vois quelques réticences à céder à cet ultime désir du mourant( ou catalogué comme tel) Tout d’abord il faut qu’il soit conscient, pour ne pas décider à sa place .
A l’encontre de Houellebecq , je concède que le désir de mourir existe( je parlerais plutôt de désir d’abréger ses souffrances, arrêter de vivre étant perçu comme le seul moyen)C’est d’ailleurs ce choix largement induit par la douleur,que je qualifie de piètre et ai du mal à ériger au rang de liberté .
En parlant d’induction, d’ailleurs comment ne pas mieux dégouter un patient de la vie qu’en ne le soignant pas ! Et ici j’enfonce le clou avec Houellebecq quand il évoque le cout du traitement de Vincent Lambert, au demeurant le choix pour le soignant de privilégier telle vie plutôt qu’une autre .Ce n’est pas la peine de se voiler la face dans la position de vierge effarouchée, de se réfugier derrière un intransigeant serment d’Hyppocrate Il existe un lieu où le médecin doit s’asseoir dessus , c’est le champ de bataille ! Qu’il soit formel comme à Verdun ou à Alep ou non avoué comme au Bataclan.
Les liens entre argent et médecine se lient insidieusement. Déjà dans certains pays anglo-saxons des traitements couteux comme des greffes sont refusés passé un certain âge , le virus Ebola continue son œuvre car les destinataires d’un vaccin sont sans le sou : il ne reste plus qu’à espérer que le mal se répande en Europe pour que les congolais bénéficient du fameux « ruissellement ».Il y a déjà quelques années , en Allemagne, de bonnes âmes démarchaient des vieux isolés pour les inciter au suicide .Se débarrasser des bouches inutiles et des corps trop onéreux prend effectivement le pas petit à petit sur la solidarité.
Quand va t-on décider, non pas de tuer( le vilain mot )mais de débrancher , d’arrêter de nourrir ?Bien sur pour l’instant quelques heures avant l’issue fatale ou quand l’état sera jugé irréversible. Passé un certain laps de temps , les quelques heures deviendront quelques jours, l’habitude aidant on passera à quelques semaines et, connaissant la noirceur de l’âme humaine et l’état de nos finances publiques, le suicide assisté sera proposé dès le diagnostic. Une fois passé dans les mœurs pourquoi ne pas le recommander pour ceux dont la souffrance ou l’aspect nous sont insupportables ?
En extrapolant un tant soit peu, l’eugénisme n’est finalement pas si loin
Je choisirai toujours ceux qui ont fait le choix de la vie quand bien même serait elle misérable ou « indigne » .Leur refuser cette liberté est par définition irrémédiable
Je m’opposerai à toute loi officialisant une médecine de classe ; ou une médecine de guerre A moins que nos dirigeants de tous bords admettent enfin que nous sommes dans cette état, pontifiant Jaurès quand il disait que le système ,que nous chérissons à peu près tous, l’amène comme la nuée conduit l’orage.
Je partage avec le commentateur précédent ma perplexité sur la sens.. COMMUN et partagé possible du mot « dignité » à l’heure actuelle. Comme le sens du mot « respect ». L’âge venant insidieusement maintenant, je peux dire qu’ayant grandi, et passé beaucoup de temps dans le milieu médical, j’ai vu une évolution néfaste qui accompagne l’effondrement de la transcendance dans l’Occident : les médecins deviennent de plus en plus ceux qui guérissent, tout comme les femmes deviennent celles qui DONNENT la vie. (choix oblige). Mais l’observation, et l’expérience m’ont enseigné que tout comme un médecin ne guérit pas son patient, il permet aux forces de la vie de reprendre le dessus, une femme ne donne pas la vie car il n’est pas dans ses capacités, ni dans son pouvoir, de la donner. Je préfère dire qu’une mère, dans l’acte de mettre au monde, est celle par qui la vie passe, et est transmise. Nuance importante, tout comme la nuance importante qui sépare Houellebecq de personnes croyantes à partir de l’action de la prière. Oui. L’adresse de la prière ouvre le Ciel, et instaure au moins une certaine forme de transcendance…
Pour la mort… il me semble tout aussi dangereux… pour la société, et pour les médecins, d’institutionnaliser en toute transparence des actions mettant un terme à la vie, et de légiférer sur ce sujet.
Encore une fois, mon expérience, et mon observation m’amènent à penser que nous sommes collectivement dans une grande tourmente avec l’effondrement de la transcendance, et que perdre la foi (pas forcément chrétienne, l' »Antigone » de Sophocles fait appel à un au-delà du pouvoir politique qui le transcende…), la renvoyer sous toutes ses formes à une histoire de dupe n’agrandit personne, et fait faire banqueroute… à la société toute entière.
Institutionnaliser la mort, et mettre son exécution entre les mains des médecins ne me semble pas bon… ni pour les citoyens, ni pour les médecins. Procéder ainsi revient à faire croire aux citoyens qu’ils ont le droit de choisir… « librement » leur mort, et ainsi, qu’ils disposent d’un pouvoir individuel qui doit leur échapper pour NOUS permettre de rester humains, c’est à dire, de faibles créatures soumis à la mort, et par bonheur, une mort que nous ne pouvons pas prévoir, et contre laquelle une assurance tous risques n’est pas possible.
Ce dossier, comme celui de l’avortement, interroge le statut de l’Homme comme individu pris dans un corps social. L’individu a des actes qui répercutent sur le corps social, et il ne peut pas être un atome isolé. Ces « choix » ne peuvent donc pas être PRIVES, et cela me semble capital à comprendre, à une époque qui nous pousse à croire que l’exercice de la liberté se fait par le biais de choix volontaires et conscients situés dans la sphère privée.
Est à interroger à l’heure actuelle l’effet de tant de transparence et de PUBLICITE sur un dossier où une certaine opacité par le passé permettait aux personnes de s’éclipser discrètement (avec la compassion des médecins) sans que leur décès soit sous les projecteurs, et sans que leur cas risque de devenir jurisprudence, et un exemple pour d’autres.
Et le mot « publicité, encore une fois, est à entendre comme renvoyant à la question du « privé »…