Post-vérité, relativisme, remise en cause des enseignements critiques et rationnels, diffusion des idéologies ethno-essentialistes et racialistes plaçant la science « occidentale » sous régime de soupçon, fascination complotiste : en préparant et en accoutumant les esprits à l’asservissement, ce désastre culturel vise le cœur du politique, il s’en prend à la constitution d’une cité réunissant des esprits autonomes. L’heure est au réarmement conceptuel. Il m’a semblé opportun de republier la recension que j’ai faite du livre de Cyrille Baudoin et Olivier Brosseau Enquête sur les créationnismes1. Ce livre montre comment une idéologie obscurantiste s’empare des apparences scientifiques et s’introduit dans les esprits, non sans subtilité, comme une hypothèse présentable. On n’y résiste pas en la balayant d’un revers de main. La culture scientifique est nécessaire, elle fait partie des humanités. Elle n’est jamais acquise définitivement, et son exercice suppose, comme toujours, un combat intellectuel.
Caractériser et déconstruire les doctrines créationnistes
Qu’est-ce que le créationnisme ? Chaque esprit ayant une teinture de culture scientifique croit le savoir et s’en croit protégé : c’est une erreur. Bien au-delà de l’anti-évolutionnisme qui campe sur le récit de la Création tel qu’il apparaît dans la Genèse (créationnisme littéraliste), le créationnisme est polymorphe et ne prend pas si simplement, comme on le croit trop souvent, la science directement pour cible. Non seulement il est polymorphe, mais il est pervers – les auteurs me pardonneront cette allusion freudienne. Ses formes les plus récentes, les plus sophistiquées et les plus insidieuses s’emparent des apparences scientifiques, instrumentalisent la science, la pervertissent jusqu’à reprendre l’idée même d’évolution qu’elles requalifient de manière finaliste, et souvent avec une bonne dose de subtilité.
Ainsi en va-t-il, par exemple, de la doctrine du « Dessein intelligent » qui « affirme que certaines caractéristiques de la nature sont mieux expliquées par une cause intelligente plutôt que par un processus non dirigé tel que la sélection naturelle ». Ce finalisme rénové évite les propos choc – on ne nomme ni Dieu ni la Bible – et finit par s’insinuer comme une hypothèse présentable concurrente de l’explication scientifique – laquelle ne recourt à aucune espèce de fin, toute fin étant par définition inaccessible à l’expérience et introduisant un élément surabondant dans le schéma explicatif, en contradiction avec le principe de l’économie des hypothèses.
Il importait donc de cerner cette prolifération, de la décrire dans ses atours, détours et perversions, d’où l’usage au pluriel du terme « créationnismes » – repris d’un précédent livre publié par les auteurs en 20082 – , et de raisonner cette description en identifiant, à chaque fois, la tête de l’hydre par des caractéristiques discriminantes qui reposent sur quatre présupposés énumérés p. 22 :
- Le monde a été conçu par une intelligence surnaturelle visionnaire (pour les religions monothéistes, il s’agit de Dieu) ;
- l’esprit est une réalité distincte de la matière (spiritualisme)3 ;
- l’être humain est intrinsèquement différent de l’ensemble des êtres vivants, ce qui lui confère un statut spécial dans la Création (anthropocentrisme) ;
- tout processus historique lié au monde physique et au monde vivant est nécessairement dirigé ou a une direction prédéterminée (finalisme).
Il fallait, bien sûr, rappeler parallèlement les principes fondamentaux de l’explication scientifique : scepticisme sur les faits, rationalité et parcimonie des hypothèses, réalisme s’agissant de l’existence du monde, matérialisme méthodologique – distinct du matérialisme philosophique, ce matérialisme est en fait un principe d’accessibilité aussi bien des éléments expliqués que des éléments expliquants (on n’explique pas la révolution d’un corps céleste en disant qu’un ange le pousse avec son doigt..). On aurait pu souhaiter que les auteurs abordent également le principe de falsifiabilité des hypothèses4, mais ce rappel, en lui-même très utile et opportun, se borne aux conditions de possibilité en amont de l’investigation scientifique et n’aborde pas sa conduite proprement dite.
Caractériser des doctrines pour les distinguer des théories scientifiques : l’enjeu n’est pas borné à des discussions de laboratoire restreintes à un milieu de spécialistes. Comme tout enjeu de pensée, il touche chacun, parce que l’autonomie de la pensée, à travers la pensée scientifique et son aspect apparemment le plus abstrait – la recherche fondamentale, la recherche des explications du monde -, est visée. Par elle c’est tout simplement la liberté de penser qui est battue en brèche. La brèche prend la forme d’injonctions religieuses, morales ou politiques qui entendent assujettir et contrôler les sciences. C’est ce que déclare avec force Guillaume Lecointre dans la préface en forme d’entretien qui ouvre le livre, d’abord en rappelant la distinction aujourd’hui fort négligée entre le contrôle de la pensée et le contrôle des actions ayant un effet sur autrui :
« La mise en raison du monde n’a pas à subir d’injonctions religieuses, morales ou politiques. Certes, les applications des sciences doivent être socialement, moralement et politiquement pilotées, mais nous ne parlons pas ici des applications. Nous parlons de l’explication rationnelle du monde réel qui, elle, ne saurait se produire en fonction des attentes des uns ou des refus des autres » (p. 17).
Puis il énonce l’enjeu fondamental lequel affirme la coïncidence entre la liberté politique et la liberté scientifique. Oui l’autonomie de la science concerne tout le monde :
« Le mot clé est le mot laïcité. »
Et de poursuivre par une formule qui énonce parfaitement la circularité entre les savoirs rationnels et l’exercice de la liberté :
« Cultiver l’exercice de la raison a le double avantage de maintenir l’autonomie du cœur méthodologique des sciences et de permettre l’émancipation individuelle. »
Il est urgent de fournir des clés pour détecter et déconstruire les discours créationnistes, parce que l’urgence pour la liberté est toujours de se soustraire à la tutelle de la pensée. Aucune morale séparée, aucun prêchi-prêcha célébrant des « valeurs » démocratiques laïques et sociales n’est capable de produire réellement cet effet d’autonomie, car cela ne relève pas de conseils bienpensants : un homme intègre peut rester crédule, et dès lors son intégrité vole en éclats. C’est aussi simple que cela. On a beau le savoir, il faut effectuer vraiment ces mises à distance, il faut passer par le parcours critique, lequel n’est jamais terminé et donné une fois pour toutes. Le meilleur des parcours d’autonomie n’est autre que la constitution des connaissances, par l’épreuve de l’erreur et du désaccord, par l’épreuve qui fait que chacun, pour véritablement s’instruire et s’élever, doit rompre avec ses préjugés et se fâcher avec lui-même. Voilà pourquoi, parmi les disciplines scolaires, les sciences sont exemplaires de cette coïncidence substantielle entre instruction et émancipation. C’est ce que l’école, à grand renfort de « compétences » et d’« objectifs » pour la plupart dictés par le dieu société, ne veut plus savoir, c’est ce qu’elle ne fait plus, sacrifiant l’autonomie de l’homme sur l’autel de l’épanouissement de l’enfant.
Expansion et diversification du créationnisme
Le créationnisme n’est donc pas un et simple, mais protéiforme. Autre préjugé, conjugué au précédent, qu’il importe de combattre : pas plus qu’il n’est réductible à une dogmatique anti-scientifique de bas niveau, le créationnisme n’est circonscrit à quelques régions du globe, en particulier cette Bible Belt, ce ramassis de bigots bornés dont on peut se gausser à peu de frais sans s’engager dans l’effort de l’analyse et de la critique rationnelles de détail. On ne nous la fait pas… : la condescendance revient ici à s’aveugler et à laisser le champ libre à ce que les doctrines créationnistes ont de plus inventif et de plus insidieux. Comme toute forme d’ignorance, c’est une façon de s’accoutumer à l’asservissement.
Le livre nous ouvre les yeux. Le créationnisme se répand partout, jouissant de la caution d’autorités « scientifiques » qui, intentionnellement ou « par faiblesses épistémologiques » (p. 150), parce qu’elles ne sont pas fermes sur les principes qui fondent l’exercice même de la pensée scientifique, brouillent les frontières entre science et religion, célébrant leur mythique et si peu dérangeante « complémentarité », et proposant une science spiritualisée pour concilier leur foi personnelle avec la démarche scientifique.
Il s’agit bien d’une « enquête ». Éclairée par des entretiens avec de nombreux scientifiques, elle couvre à la fois un champ épistémologique – définir le créationnisme, l’identifier sous ses formes les plus anodines en apparence, en établir la disjonction absolue avec toute démarche scientifique – , un champ géopolitique et une analyse des stratégies de communication et de contrôle. L’enquête se déplace aussi bien intellectuellement que géographiquement, fournissant à chaque étape la description de nombreuses variantes, toutes plus sophistiquées les unes que les autres, sur l’ensemble de la planète.
Le créationnisme n’a que faire des clivages religieux : la propagation d’un créationnisme musulman va bon train, notamment en Turquie. On passe des USA à l’Europe, où l’offensive créationniste se déploie au Royaume-Uni, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Italie, en Russie, Pologne, Roumanie. La France est loin d’être épargnée – un chapitre entier est consacré à « la diversité des créationnismes en France », avec notamment l’Université interdisciplinaire de Paris. Sous la houlette de son secrétaire fondateur Jean Staune, cet organisme se propose d’établir un dialogue et des ponts entre science et religion, présentant la thèse d’une autonomie du monde physique comme obsolète vu « l’évolution des sciences » récente qui donnerait « une crédibilité » à l’existence d’un « autre niveau de réalité ». Ce mouvement reçoit l’appui de personnalités scientifiques telles que Trinh Xuan Thuan, Thierry Magnin, Bernard d’Espagnat, Jean-Marie Pelt, Anne Dambricourt-Malassé, Dominique Laplane, Jean-François Lambert. Le biochimiste australien Michael Denton dont les livres sont des références pour le courant du « Dessein intelligent » aux USA est publié en bonne place dans les collections abritées par ce centre. Sans compter les personnalités médiatiques comme Michel Cazenave ou Luc Ferry… : on en apprend de belles !
Lire le livre de Cyrille Baudouin et Olivier Brosseau, c’est s’instruire. S’instruire de l’existence proliférante des créationnismes sous des formes diverses dans leur expansion universelle ; s’instruire de leurs procédés, et particulièrement de ceux par lesquels ils se rendent présentables en instrumentalisant la démarche scientifique qu’il s’agit en réalité de museler ; s’instruire de leurs stratégies de communication et de contrôle (notamment dans l’enseignement des sciences) ; s’instruire enfin – ou plutôt se ré-instruire – de ce qu’est une démarche scientifique.
Toutes ces élucidations sont convergentes. Si le contenu empirique du livre – les formes multiples de créationnisme – nous étonne et nous inquiète, c’est que nous n’étions pas préparés à le recevoir, croyant savoir ce qu’est le créationnisme. Il y a belle lurette que ce dernier a quitté une image d’Épinal qu’on balaie d’un revers de main et qu’il emprunte des oripeaux présentables dans les dîners en ville et même les colloques les plus raffinés.
Que le créationnisme soit diversifié, qu’il se répande partout, qu’il singe la science et se l’annexe, qu’il s’accompagne de mesures politiques et sociales comme la privatisation de l’enseignement et le contrôle religieux, cela est inquiétant. Mais plus inquiétant encore est que nous ayons besoin d’une ré-instruction, d’une remise des pendules à l’heure pour réapprendre ce qu’est une démarche scientifique et qu’un réarmement général contre l’obscurantisme et l’asservissement intellectuel soit autant à l’ordre du jour. Ce livre n’est pas seulement une enquête de type journalistique où on apprend des faits, c’est aussi une grosse piqûre de rappel, un fortifiant où on retrouve et réaffermit les conditions dont dépendent l’esprit critique et l’autonomie de chacun. Il est donc à placer sur le rayon des urgences pour l’autodéfense intellectuelle5.
Notes
1 – Cyrille Baudouin et Olivier Brosseau, Enquête sur les créationnismes. Réseaux, stratégies et objectifs politiques, Paris : Belin, 2013. Site de présentation du livre : http://www.tazius.fr/les-creationnismes
La recension ci-dessus est la reprise, avec quelques aménagements et actualisations, d’un article publié sur l’ancien site Mezetulle.net en 2013.
2 – Les Créationnismes, Syllepse, 2008.
3 – On pourrait chicaner ici sur l’usage du terme « distinct » (car les idées, comme par exemple les concepts mathématiques ou pour prendre un exemple très différent les phénomènes produits par l’inconscient, ont des propriétés spécifiques, distinctes, qui les rendent analogues à celles de la matière au sens strict dans la manière de les étudier et de les établir) alors qu’il eût mieux valu écrire « séparé » pour caractériser le spiritualisme, croyance en une entité vraiment substantielle et hors d’atteinte de toute proposition falsifiable. Mais on comprend bien la thèse générale et l’enjeu.
4 – Une hypothèse ne doit pas simplement avancer une explication plausible, elle est même insuffisante si elle ne propose que des procédures permettant de la vérifier : il faut encore qu’elle propose les moyens détaillés et complets de la ruiner, et seul l’échec de ces tests (tentatives de falsification) permet de la retenir. La formulation de ce principe est attribuée à Popper, mais il a été exposé par Pascal dans le Récit de la grande expérience de l’équilibre des liqueurs (expérience du Puy de Dôme) et par d’Alembert dans ses Eléments de philosophie.
5 – L’expression « autodéfense intellectuelle » a été reprise à Noam Chomsky par Normand Baillargeon dans l’intitulé de son livre Petit cours d’autodéfense intellectuelle (Lux, 2006). A signaler le « Cours d’autodéfense intellectuelle » mené par Sophie Mazet au Lycée Blanqui de Saint-Ouen (93) et le Manuel d’autodéfense intellectuelle qu’elle a publié en 2015 (Laffont).
Bonjour Catherine,
À part chez les intégristes, ce problème est présent de manière significative en France ? On a des chiffres ?
78 % des Américains ( http://homofabulus.com/les-derniers-chiffres-du-creationnisme-aux-etats-unis/ ) continuent à croire mordicus au créationnisme et autres fariboles (ou pire à voter Trump). Il faut dire qu’avec leur devise nationale (« En Dieu, nous croyons »), ils sont un peu conditionnés à être des crétins. Ça expliquerait le niveau de barbarie de ce peuple que ça ne m’étonnerait pas.
Bien cordialement.
Il est salutaire de répertorier toutes les manipulations des créationnistes et bien évidemment de dénoncer leur volonté d’emprise sur l’opinion, mais à mon sens il faut commencer bar balayer devant sa porte.
Ils n’ont pas meilleurs alliés que les darwiniens. Et ce pour plusieurs raisons.
Premièrement ce sont d’exécrables pédagogues. Hormis l’épigénétique , les principes de l’évolution sont aisés à comprendre. Les individus sont le jeu de mutations génétiques qui les transforment physiologiquement . Ensuite soit ces modifications sont compatibles avec l’ environnement et ils prospèrent sous leur nouvelle forme, soit elles ne le sont pas immédiatement ou au cours du temps, et ces nouveaux spécimens meurent. Exemple à une époque E et à un instant T , des herbivores subissent des mutations qui les diversifient et font naître plusieurs espèces. A l’instant T + un million , la végétation au sol disparaît et seules ne peuvent subsister que les individus ayant un cou long(les girafes en l’ occurrence)
Or si les évolutionnistes nous informent , sur la nature de ces mutations , chimie, radiation, erreur de réplication cellulaire et insistent judicieusement sur leur caractère aléatoire, je n’en ai pas vu un seul nous renseigner sur le flux de ces mutations ; Ce qui est pourtant capital. Une fois ce nombre connu et en le multipliant par le temps écoulé depuis l’apparition de la vie, le phénomène devient très tangible. Il est impossible à l’échelle du temps humain de connaître ce rapport. Nous avons bien eu vent d’individus avec six doigts ou douze orteils , mais avons retenu que le phénomène est extrêmement rare et seuls des scientifiques , manipulant des animaux ou végétaux à prolifération rapide peuvent nous délivrer ce fameux nombre.
Les évolutionnistes dévoient leur science par une communication calamiteuse qui induit dans l’opinion des conceptions désastreuses.
Exemple : les ailes des hirondelles raccourcissent ; Faux ! L’intensification du trafic routier fait que les hirondelles aux ailes longues ont un vol moins contrôlable et sont victimes des véhicules. La véritable phrase est : les hirondelles aux ailes longues meurent. Il ne faut jamais oublier que les deux moteurs de l’évolution sont les changements physiologiques aléatoires et …la mort. Si nous oublions ce précepte nous induisons dans l’opinion des conceptions éthérées et futiles sur l’adaptation. Je suis pratiquement persuadé que le quidam moyen voit pousser des nageoires aux victimes planétaires de la montée des eaux.
Ces métaphores douteuses qui plus est ne sont pas étrangères à ce que l’on appelle le darwinisme social ou du moins à sa ligne directrice : ce sont les plus forts qui s’adaptent le mieux et qui survivent.
Encore une fois , faux et archi-faux. Que je sache, il y a soixante dix millions d’années , ce sont bien les plus forts, tyrannosaures et autres brontosaures qui ont disparus !Seul le hasard et la nécessité préside au destin des espèces. Des chevaux peuvent très bien disparaître d’un continent et y être introduit quelques siècles plus tard avec succès, les conditions climatiques, étant simplement modifiées . Péripétie qui ne fait en aucun cas des chevaux une espèce faible.
Deuxième défaut des darwiniens : le panglossisme.
Quelques exemples pris au hasard des médias. Pourquoi les pygmées sont petits et les massais grands ?
Évidemment l’évolutionniste y met son grain de sel. La moindre surface épidermique des pygmées leur permet de mieux résister au froid de la forêt équatoriale par limitation des échanges thermiques. Passons sous silence les épisodes neigeux de la forêt gabonaise et appliquons la théorie.
Il existait dans la forêt de grands pygmées et des petits .Question : quelle curieuse maladie, due au « froid « a pu décimer les grands pygmées entre l’âge de la puberté , où futurs grands et petits ont quasiment la même taille, et l’âge de la reproduction et donc de la transmission des caractères de taille ( un ou deux ans plus tard, pas plus car le pygmée a une espérance de vie de trente cinq ans ) ?
Si on m’avait posé la question sur la taille des pygmées , j’aurais évoqué un peuple de parias réfugiés dans la forêt. Mais pourquoi faire simple…. ?
Quant à la stature des massais, l’explication permet bien la non contradiction à être grand dans leur habitat mais n’explique en rien l’interdiction d’être petit ;
Autre déclinaison plus cocasse dans le domaine médical : l’évolution aurait sélectionné les cancers des organes secondaires au détriment des organes vitaux dont en priorité le cœur.
Effectivement le cancer du cœur est rarissime mais le cancer est une maladie de vieux qui permet sa transmission , si transmission il y lieu au fil des générations. Il ne connaît pas d’organes vitaux, puisque n’importe où , où il prend source , il se répand dans tout le corps et tue inexorablement.
J’ai posé la question à un médecin qui m’a expliqué le phénomène par l’extrême lenteur des divisions cellulaires cardiaques .Mais on peut imaginer , une époque de la vie sur terre où le cœur sur ce point était logé à la même enseigne que les autres organes et d’où il faut exclure également les métastases. Ce qui fait beaucoup de conditions qui ne nous empêcherons pas de retomber sur ce fameux flux d’erreurs de réplication qui devra lui être extrêmement important pour pallier une espérance de vie très courte des premières âges. Bref un exercice de funambulisme cognitif.
Comment faire face au vice des créationnistes quand on véhicule soit même une pensée magique qui nourrit par son mécanisme l’adversaire ?
Je ne comprends pas bien la différence (et parfois le parallèle) que vous faites entre « évolutionnistes » et « darwiniens » ni pourquoi vous faites du darwinisme le meilleur allié du créationnisme. A moins que vous réserviez le terme « évolutionnisme » au lamarckisme. Car ce que vous décrivez (modifications des espèces dues au hasard de l’apparition de caractères sélectionnés par des conditions elles aussi contingentes) c’est bien cela que soutient Darwin ! Le concept de mutation génétique a permis par la suite de théoriser l’apparition hasardeuse de modifications. Seules les modifications ayant une conséquence sur la reproduction ont été « retenues » (sélectionnées). Aucune main invisible n’intervient…
Le mot « évolution » est un terme qui a besoin d’explication afin d’être débarrassé de ses connotations finalistes. Il s’agit d’une sélection effectuée aveuglément par des conditions de survie (c’est-à-dire principalement par les conditions favorables ou défavorables à la reproduction) sur une population. Le darwinisme est exempt de tout finalisme, il met en place une causalité indirecte et a posteriori qui s’exerce par les lois des grands nombres (l’évolution résulte d’une sélection sur des populations et non de l’adaptation progressive des individus de ladite population à des conditions). L’exemple des hirondelles, que vous prenez, fonctionne selon ce processus : les hirondelles aux ailes courtes sont, dans les conditions décrites, favorisées ; elles s’y reproduisent plus facilement et la loi des grands nombres fait que, au bout d’un certain temps (qui dépend de la fréquence de reproduction de l’espèce concernée), la population des hirondelles présente plus d’individus aux ailes courtes que d’individus aux ailes longues, et les individus aux ailes courtes sont toujours de plus en plus nombreux. Mais les individus aux ailes courtes ne sont pas le résultat d’une adaptation : ils existent au départ et sont déjà adaptés (par hasard) aux conditions qui vont les favoriser (conditions elles-mêmes contingentes). Le cou de la girafe ne s’est pas allongé, les girafes n’ont pas fait un effort pour brouter les feuilles des arbres élevés comme le pensait Lamarck (ce qui supposerait du reste une hérédité des caractères acquis) : des girafes au cou un peu plus long que les autres existaient et elles ont été favorisées par un type de végétation aérienne. C’est bien ce que vous décrivez, mais c’est cela le darwinisme : une causalité indirecte dont l’un des moteurs est la loi des grands nombres, et non une causalité adaptative directe qui « ferait pousser » des nageoires et « raccourcir » des ailes !
Une lecture fondamentale pour éclairer l’histoire de la notion d’évolution et de prétendue « adaptation » des espèces (et aussi pour l’ensemble de l’épistémologie des sciences de la vie) : François Jacob, La Logique du vivant.
Merci de votre réponse
Ce n’est pas le darwinisme que je détiens comme le meilleur allié du créationnisme, mais les darwiniens. J’intègre parfaitement les théories de Darwin que je tiens pour évolutionniste et conteste fermement les élucubrations de ceux qui croient que le monde a été créé en six jours ou ceux qui voient une finalité dans le destin de la vie et de l’univers ou tout énergumène allant peu ou prou dans ce sens.
Autant dire qu’avec vous et les darwiniens , je comprend, accepte et diffuse le fait que les girafes ne sont que les rescapées d’un changement climatique et que les hirondelles aux ailes courtes celles de l’intensification du trafic routier. Comme le disait Monod ( à moins que ce ne soit Jacob ou Lwoff) enfin l’un des trois prix Nobel : nous sommes le fruit du hasard et de la nécessité. Le hasard de mutations génétiques aléatoires et la nécessité de survivre à notre environnement.
Petite entorse avec ce que vous avez décrit : il n’est plus nécessaire que les survivants soient préexistant s : j’en avais fait un préalable, avec l’apparition de l’épigénétique, il paraît que seule l’existence de gènes suffirait parfois ( De part une activation possible par l’environnement .)
Je reviens sur l’aspect paradoxal de ma phrase d’introduction. Ce ne sont pas les créationnistes, ce n’est pas vous, ce n’est pas moi qui diffuse les inepties suivantes : les ailes des hirondelles raccourcissent, les baleines maigrissent, le museau des renards s’allongent. Ce sont les scientifiques darwiniens au terme de leurs études. Ces gens font des découvertes capitales et les fourvoient en propageant des âneries.
Car dans la lutte contre les créationnistes tout est une affaire de communication et ,dans une moindre mesure de pédagogie. Ne pas pourrir l’opinion d’abord et si possible enseigner.
Il existe dans les eaux tropicales un petit poisson qui a le portrait de son prédateur exactement dessiné sur son dos : ce qui bien évidemment lui a permis de survivre. Comment voulez vous que le péquin moyen n’y voit pas la main de dieu. ? A moins qu’un scientifique ne lui communique le nombre phénoménal de mutations génétiques qui ont dessinés avant une quantité non moins astronomique de dessins dorsaux . Combien de mutations pour une population donnée en un temps donné ? Dix , vingt , trente par an pour dix , vingt , trente mille individus ?Connaissez vous ce nombre ? Est il dans le livre que vous me préconisez ?Il est le seul a lever toute ambigüité. Au lieu de ça les scientifiques font du style.
Quand ils ne s’égarent pas à vouloir tout expliquer par le biais de l’évolution. Se ridiculisant dans des hypothèses fumeuses aboutissant inéluctablement dans l’impasse .Les créationnistes en feront leur choux gras . Eux tiennent la route en matière de communication.
OK merci pour ces précisions. Ce que vous dites est plutôt inquiétant….
N’est-il pas normal, logique, fatal d’être créationniste à partir du moment où l’on croit en un dieu créateur (comme le fait le judaïsme, le christianisme, l’islam, et j’en oublie) ? De la même façon que la croyance en ce dieu créateur implique spiritualisme, finalisme, dualisme.
On notera cependant que même des matérialistes, à la Marx, n’ont pas su renoncer à quelque finalisme immanent à l’Histoire. Voire à un certain messianisme plus ou moins prophétique impliquant une approche plutôt métaphysique de l’Histoire.