Archives de catégorie : Recensions

Comptes rendus et analyses de livres

Michel Guérin sur André Leroi-Gourhan, lu par Alain Dermerguerian

En lisant le dernier ouvrage de Michel Guérin « André Leroi-Gourhan – L’Évolution ou la liberté contrainte » (Hermann, 2019), Alain Dermerguerian propose une méditation sur un matérialisme non réductionniste et réflexif. Il montre comment, dans les trois essais qui composent le livre, « Michel Guérin réitère sur l’œuvre de Leroi-Gourhan l’opération même de celui-ci sur la poïétique préhistorique. L’art et la philosophie culminent chez Michel Guérin en une pensée comme geste inchoatif, la matière vivante de la Forme qui se féconde, se métamorphose, et se retrouve enfin dans l’accomplissement de l’œuvre – cette idée auto-matérialisée ».

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« Plaidoyer pour l’universel » de Francis Wolff, lu par Philippe Foussier

L’avenir de l’universalisme

Philippe Foussier a lu « Plaidoyer pour l’universel de Francis Wolff » (Fayard, 2019). Ce livre roboratif et solidement étayé, où l’auteur affronte les détracteurs de l’humanisme universaliste dans toute leur variété, propose une analyse et des arguments pour ne pas désespérer de l’air du temps différentialiste.

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L’attention esthétique. Lecture du livre de B. Nanay « Aesthetics. A Very Short Introduction »

Conformément d’ailleurs à l’étymologie et à la conception de Baumgarten qui y voyait la « science de la connaissance sensible » (1750), Bence Nanay, professeur à l’université d’Anvers et ancien critique de cinéma, considère essentiellement l’esthétique sous l’angle de la perception. Dans le livre qui vient de paraître, Aesthetics : A Very Short Introduction, il s’intéresse, en particulier, à la question de l’attention esthétique.

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« Laïcité : une question de frontière(s)? » (dir. Frédérique de la Morena)

Issu d’un colloque tenu à l’Université Toulouse 1 Capitole en novembre 2018, l’ouvrage collectif « Laïcité : une question de frontière(s) » dirigé par Frédérique de la Morena illustre, explique et défend une idée fondamentale : l’association politique laïque suppose des distinctions, des « frontières », des séparations. Que celles-ci soient méconnues, brouillées, grignotées, que des brèches y soient effectuées et la laïcité perd son sens, quand elle ne se perd pas tout entière.

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« Les Troubadours » de Gérard Le Vot, lu par Jean-Yves Bosseur

L’art des troubadours représente une alliance véritablement alchimique de la musique et de la poésie, du chant et de la langue. C’est ce que démontre avec une particulière pertinence et de manière très étayée Gérard Le Vot dans son ouvrage « Les Troubadours, les chansons et leur musique (XIIe-XIIIe siècles) », sans aucun doute le plus complet à ce jour dans un tel domaine.

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Les derniers mots de Léon Brunschvicg

Lecture du livre « Héritage de mots, héritage d’idées » (PUF, 1945)

Il y a exactement cent cinquante ans, le 10 novembre 1869, naissait le philosophe français Léon Brunschvicg. Il termina son dernier livre, « Héritage de mots, héritage d’idées », deux mois avant sa mort, alors que, persécuté par les nazis, son habitation parisienne et sa bibliothèque pillées, il avait fini par trouver refuge à Aix-les-Bains.

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« La parole du mille-pattes. Difficile démocratie » de Jean-Paul Jouary, lu par Valérie Soria

La lecture du livre de Jean-Paul Jouary « La parole du mille-pattes. Difficile démocratie » (Encre marine, 2019) nous convie à une plongée, ou plutôt à une remontée allant bien en deçà des analyses de la démocratie occidentale ancrée sur le modèle de la Grèce antique. L’hypothèse philosophique est que la démocratie est le socle de la forme première de toute organisation humaine. S’efforcer de revenir, à travers et au-delà des formes multiples, au terreau de toute forme de société, dès le Paléolithique, c’est prendre l’universalisme au sérieux et mesurer ce qu’est le principe démocratique comme principe de justice et de conciliation par la parole bien comprise.

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Une autre généalogie de la morale

Sur le livre de Philip Pettit « The Birth of Ethics »

Le nom du philosophe Philip Pettit, professeur à Princeton, est surtout associé à la notion de « républicanisme ». Dans « The Birth of Ethics » (Oxford University Press, 2018 ; version enrichie de conférences qu’il a données en 2015), il se fixe une tâche ambitieuse : explorer la nature de l’éthique en essayant de déterminer comment celle-ci a pu apparaître.

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« Journal d’un indigné » d’André Perrin, lu par C. Kintzler

André Perrin publie « Journal d’un indigné » (Paris : L’Artilleur/Toucan, 2019) où l’on retrouvera la plume alerte et l’humour implacable dont il nous avait déjà régalés avec « Scènes de la vie intellectuelle en France. L’intimidation contre le débat » (Paris : éd. du Toucan, 2016).

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Le retour du fascisme ?

Analyse du livre d’Emilio Gentile « Chi è fascista »

En proposant une analyse de l’ouvrage récent d’Emilio Gentile « Chi è fascita », Samuël Tomei rappelle, non sans humour, que l’usage prétendument générique, en réalité imaginaire, analogique et projectif, du terme « fasciste » n’a pas attendu la seconde moitié du XXe siècle pour qualifier tout régime autoritaire ou tout dirigeant nationaliste avec en prime un avertissement au sujet d’un retour « des années les plus sombres de notre histoire ». Cet usage idéologique, confusionniste et moralisateur s’érige aujourd’hui à peu de frais en « antifascisme » ; il relève d’une paresse intellectuelle prétentieuse et aveugle qui brandit une démocratie de façade impuissante face aux oligarchies.

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Le désir de savoir

Sur le livre de Pascal Engel « Les vices du savoir »

De même qu’il existe une « éthique des vertus », s’est développée depuis une trentaine d’années une « épistémologie des vertus », à laquelle le philosophe Pascal Engel vient d’apporter – même si son livre ne se rattache pas qu’à ce courant – une contribution importante (en langue française, ce qui n’est pas très fréquent) avec « Les vices du savoir. Essai d’éthique intellectuelle ». Je n’aurai pas la prétention de recenser à proprement parler cet ouvrage ; j’aborderai seulement (et arbitrairement) quelques-uns des nombreux sujets qu’il traite de façon approfondie : les croyances religieuses ; la question de savoir s’il existe des évaluations proprement épistémiques ; cette question nous conduisant à examiner le problème des vérités triviales et celui de la curiosité.

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Vague, le monde est vague

« Pragmatism and Vagueness » de Claudine Tiercelin, lu par Thierry Laisney

Dans « Pragmatism and Vagueness », livre constitué de trois conférences données à Venise en mars 2018, la philosophe Claudine Tiercelin, professeure au Collège de France, examine la question du vague (vagueness) à la lumière du rôle qu’elle joue dans l’œuvre de Charles Sanders Peirce (1839-1914), le « fondateur du pragmatisme ».

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« La nouvelle question laïque » de Laurent Bouvet, lu par Catherine Kintzler

Le titre de l’ouvrage de Laurent Bouvet « La nouvelle question laïque » (Flammarion, 2019) est pleinement justifié. La question laïque est bien nouvelle aujourd’hui en France. Nullement en ce sens qu’il faudrait – bien au contraire ! – réviser le concept de laïcité, l’accommoder au goût du jour ou procéder à son aggiornamento. La nouveauté est la manière dont la question de la laïcité se pose, les lignes et fractures politiques qu’elle révèle, qui l’enrichissent, et qui finalement permettent de « défricher à nouveaux frais la voie républicaine vers la laïcité ». En retraçant un pan de l’histoire politique récente, le livre situe les enjeux d’un combat laïque renouvelé.

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« Le sexe et la langue » de Jean Szlamowicz, lu par Jorge Morales

L’essai du linguiste Jean Szlamowicz « Le sexe et la langue. Petite grammaire du genre en français, où l’on étudie écriture inclusive, féminisation et autres stratégies militantes de la bien-pensance » (Paris, Intervalles, 2018) analyse doctement les outils idéologiques de l’inclusivisme, dernier avatar d’une novlangue prenant prétexte de la défense des femmes pour imposer une réforme morale inspirée par l’idéologie de la déconstruction. Il examine les interprétations militantes et fantaisistes qui projettent sur la grammaire des questions sociales, politiques et culturelles. Il faut donc que la rationalité linguistique remette les points sur les « i », redonne son sens à la fonction de la langue, qu’elle écrase l’infâme diabolisation morale des contradicteurs afin de mieux combattre les « gardiens de prison qui pensent que leur surveillance [n]ous libère ».

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« Combattre le voilement » de Fatiha Agag-Boudjahlat, lu par Jorge Morales

Le courage et la pertinence de la plume de Fatiha Agag-Boudjahlat forcent l’admiration. Son dernier ouvrage « Combattre le voilement » (Paris, Cerf, 2019, préface d’Elisabeth Badinter) n’est pas un simple essai à contre-courant sur le voile en tant qu’objet, signe ou signal. Il analyse en profondeur le voilement islamique, acte que l’auteur combat en le présentant sans concession pour ce qu’il est : la normalisation (ou du moins la relativisation) d’une pratique sexiste et communautariste qui cherche à s’imposer partout au nom des droits de l’homme et de la liberté individuelle – nouveau dogme contemporain.

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« Considérations sur l’Europe » de Jean-Claude Milner, lu par C. Kintzler

À l’approche des élections européennes, il est plus qu’opportun de lire le livre de Jean-Claude Milner, « Considérations sur l’Europe. Conversation avec Philippe Petit » (Paris : Cerf, 2019). L’auteur y développe sa vision politique de l’Europe et des relations internationales, examine la question centrale de l’État-nation, et soulève le point décisif des pouvoirs de l’individu. L’ensemble, plus désabusé que fondamentalement sombre, ne s’interdit pas les échappées.

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« L’innommable » d’Adélaïde Munkantabana, lu par Alain Champseix

Après avoir rencontré l’auteur de manière fortuite, Alain Champseix a lu « L’innommable – Agahomamunwa. Un récit du génocide des Tutsi », d’Adélaïde Munkantabana. Il expose comment ce récit poignant, sans se départir de sa dimension de témoignage personnel ou plutôt parce qu’il s’y attache de manière profonde et réflexive, soulève la question fondamentalement politique des conditions de possibilité d’un génocide.

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« Outer » le Vatican : à propos de « Sodoma » de Frédéric Martel

Avec plus de rigueur que jamais, la doctrine morale de l’Église catholique condamne toute pratique sexuelle hormis la procréation d’enfants par des époux munis du sacrement de mariage. L’ouvrage de Frédéric Martel « Sodoma. Enquête au cœur du Vatican » révèle que les instigateurs de cette morale, dans leur majorité, pratiquent en secret une homosexualité qu’ils anathémisent en public – ce faisant, ils bafouent à la fois leurs vœux sacerdotaux et l’exigence universelle de vérité. On notera toutefois que l’auteur s’avance souvent masqué et parvient à ce brillant résultat par des méthodes qui ne sont pas exactement celles qu’il invoque.

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« Le triomphe des Lumières » de Steven Pinker, lu par Philippe Foussier

Le plus grand succès de l’histoire de l’humanité

L’universitaire américain Steven Pinker, auteur de « La part d’ange en nous » qui a connu un succès mondial, publie une ode à la raison, à la science et à l’humanisme, « Le triomphe des Lumières » (Les Arènes, 2018). En ces temps où toutes ces notions font l’objet de remises en cause massives, la lecture de ce livre foncièrement optimiste redonnera assurément des forces à ceux qui se reconnaissent dans l’héritage des Lumières et irritera à n’en pas douter leurs adversaires.

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Leonard Bernstein « La Question sans réponse », lu par Gérard Le Vot

Gérard Le Vot a lu le recueil de conférences de Leonard Bernstein intitulé « La Question sans réponse », récemment réédité. Il en parcourt les six leçons avec précision et jubilation, réveillant, avec ce « nomadisme exubérant de la pensée » tourné vers la musique des autres et une multitude de techniques et de plans culturels, le bouillonnement interdisciplinaire des années 1970.

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