Les « médiacrates » – comme il dit – n’ont pas à se forcer pour présenter Jean-Luc Mélenchon à l’issue du premier tour de la présidentielle comme un mauvais perdant grincheux : il s’en charge lui-même, entre dans une zone d’obscurité douteuse et s’adonne à l’ivresse du gâchis politique !
« Le plus grand défaut de la pénétration n’est pas de n’aller point jusqu’au but ;
c’est de le passer » La Rochefoucauld, Maxime 337
Au soir du 1er tour de la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon se lance dans un discours que je trouve calamiteux. Affichant une gueule renfrognée qui en dit long, il commence par présenter un résultat pourtant excellent et même, à certains égards, inespéré, comme une défaite.
Mais il y a pire que cette soupe à la grimace. Il enchaîne en renvoyant dos à dos Le Pen et Macron, et en ne suggérant (je ne parle même pas de « donner ») aucune indication de vote, comme si l’enjeu du second tour n’excédait pas la simple comparaison de programmes, et comme si à l’horizon la question de la forme de gouvernement n’était pas présente, car Marine Le Pen parle bien d’une alternance fondamentale. Pour justifier cette abstention, il se défausse sur un mandat qu’il n’aurait pas reçu, comme s’il fallait un mandat explicite pour défendre a minima la forme républicaine de gouvernement (encore en vigueur, même sous la Ve République !).
Son rôle ne serait-il pas plutôt de maintenir l’exigence de pensée, dont il s’est voulu naguère le héraut, au-delà du mot d’ordre « faire barrage » ? Pour souligner l’insuffisance de ce mot d’ordre, faut-il en récuser la nécessité ? Ce serait faire l’ange, et « qui veut faire l’ange fait la bête. »1
Quitter ainsi l’habit de lumière qu’on a si brillamment porté pendant toute une campagne électorale pour entrer dans une zone de confusion et d’obscurité, céder ainsi à l’ivresse du gâchis (addiction assez ordinaire chez les hommes politiques), c’est manquer de sens politique et d’égards pour l’intelligence des électeurs à laquelle on a pourtant prétendu s’adresser. « Les gens » s’étaient habitués à davantage de classe et d’élégance…
- Pascal, Pensées, frag. 572 [↩]
Juste pour illustrer le niveau d’égarement dans lequel le pays s’enfonce : j’entends autour de moi des « camarades de gauche » m’expliquer qu’entre le « fascisme » et le « libéralisme », ils ne choisiront pas…
Je dirais: d’accord avec ces propos. Mais il reste que nous ne pouvons pas facilement, et peut-être pas du tout accepter d’avoir un devoir de voter pour la peste contre le choléra. Donc sur ce point il me semble qu’il n’y a rien à reprocher à Mélenchon: il n’a pas donné de consigne de vote, et dit que chacun devait savoir où est son devoir. Il ne nous traite pas comme des moutons. Il en appelle ensuite à une consultation (pas une décision) de la plate-forme qui le soutient, en quoi il reste un parfait démocrate. Il a bien le droit d’être déçu et en rogne, on peut lui pardonner çà, il me semble: sa tristesse et la nôtre. Serons-nous capables de nous donner – en lui donner – une représentation parlementaire conséquente? Voilà le vrai sujet maintenant.
Certes, chacun sait où est son devoir, et JLM lui-même, s’il avait eu un peu plus de sérénité lui permettant de rester à la hauteur de la grande classe de sa campagne, aurait pu indiquer comment il conçoit le sien sans nécessairement engager, dans ce premier temps, l’ensemble des adhérents « France insoumise ». Ce n’est pas prendre « les gens » pour des moutons, me semble-t-il, de dire comment on conçoit son devoir (et ne pas le dire en la circonstance consiste à considérer, du point de vue même du devoir, qu’un vote Le Pen est comparable à tout autre et s’inscrit dans le même champ politique que tout autre). Cela n’empêchait pas d’ajouter « mais nous procéderons, comme promis et comme cela a été annoncé, à une consultation… ».
Après le résultat obtenu grâce à cette campagne brillante, exemplaire, il me semble que la moindre des choses était d’abord de le souligner et d’ouvrir des perspectives. Car à chiffre quasi-égal ce qui est une lourde défaite pour F. Fillon est au contraire une très forte avancée pour JLM. Au lieu de cela, il commence par émettre d’emblée des soupçons sur le résultat (chose que je n’ai pas signalée dans mon article, et qui pouvait être très mal interprétée…). On pouvait faire état de regrets mais en comparaison avec ce beau résultat, regrets de ne pas être au second tour, et même regrets de ne pas atteindre la 3e position.
Par sa seule construction, ce discours mal fichu avouait être entièrement fondé sur « la rogne ». JLM a bien sûr le droit d’être en rogne, mais un futur président ne peut pas fonder un discours s’adressant à l’ensemble de la nation exclusivement et ostensiblement sur un tel sentiment.
Je trouve que la formule de « Pascale BM » (voir commentaire suivant) correspond bien à ce dont je fais état dans l’article.
Ce n’était plus, en effet, la force des faibles qu’il avait si brillamment su porter, mais la faiblesse du fort, qu’il n’a su maîtriser.
On peut comprendre vos regrets, et j’admets qu’il n’ait pas su maitriser « la faiblesse du fort », mais ces critiques me semblent tout de même hors de saison. JLM mérite autre chose que ces critiques, en particulier de la part des siens. Il y aura bien assez de prébendiers parmi ses adversaires, pour inventer les interprétations les plus basses de ses interventions.
Une partie des critiques que je formule peut aussi bien être adressée à d’autres qu’à JLM : s’en tenir au silence concernant ce vote du 2e tour c’est installer ipso facto l’homogénéité politique entre Le Pen et un candidat républicain quel que soit par ailleurs son programme et le degré de rejet qu’il suscite.
La critique plus spécifique porte effectivement sur le fait que JLM, dans cette déclaration, n’est pas resté, loin de là, à la hauteur qu’il a su mettre lui-même, de façon extrêmement brillante et juste, dans la campagne qu’il a menée en vue de ce premier tour. J’ai considéré effectivement que sa personne telle qu’elle s’était révélée au cours de cette campagne méritait qu’on vote pour lui, et que, sous le coup d’un résultat qu’il espérait probablement plus important, il ne s’est pas mérité lui-même. Ce qui sans doute montre que je n’appartiens pas à ce que vous appelez « les siens », même si je ne suis pas son adversaire !!!
Mais voyons ce que diront « les siens » à l’issue de la consultation qu’il a annoncée.
Je ne suis pas non plus des siens au sens strict: je ne suis pas encarté, je fais partie des 400 000 personnes et quelques et ont soutenu sa candidature. J’attends aussi le résultat de la consultation. Je vois que je ne vous convaincrai pas. Je ne vois ce que veut dire au juste ‘il ne s’est pas mérité lui-même », et je crois qu’il a même su combiner avec sa grogne, une rigueur démocratique sans défaillance, et il y a peut-être une certaine habileté à laisser paraître sa mauvaise humeur. Mais nous verrons la suite: c’est le plus important.
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J’ai toujours eu un attachement particulier pour Mezetulle.fr et les billets notamment (par ordre de préférence personnelle et non fondée, pardon pour l’indélicatesse) de G. Desbiens, C. Kintzler et D. Tchalik, toujours écrits avec l’acuité du discernement et de l’élégance mêlés.
Dans cet article, je ne souscris cependant pas au reproche de Mme Kintzler à l’encontre de M. Mélenchon « mauvais perdant grincheux » et j’aimerais souligner les points qu’elle aborde elle-même sans les argumenter tant, sans doute, les points en question lui paraissent évidents.
1er point : le reproche de la soupe à la grimace de M. Mélenchon quant aux résultats de 19,58% qui sont pour elle excellents. « Il commence par présenter un résultat pourtant excellent et même, à certains égards, inespéré, comme une défaite. »
Je conteste fermement cette opinion. L’objectif de la France Insoumise était de parvenir au second tour et dans l’intention avouée depuis le début de l’emporter. Cette défaite est donc une catastrophe pour tous les Insoumis qui savent que le climat n’attendra pas cinq ans de plus et qu’en l’absence de planification écologique, le réchauffement climatique annoncé et déjà présent pourra s’accélérer très dangereusement, et poursuivre son oeuvre dévastatrice. Les nouveaux acquis sociaux que nous voulions accorder à l’ensemble de nos concitoyens sont également morts et enterrés pour cinq ans. Le résultat de la France Insoumise n’est donc pas « excellent », il est désastreux.
Un résultat inespéré, dites-vous ? L’adoucissement de votre propos par « à maints égards », ne vous empêchera pas de recevoir la volée de bois vert des Insoumis, car en définitive qui pensait ce résultat « inespéré », à part ceux qui n’ont guère participé à la lutte à leurs côtés ? Vous êtes une intellectuelle, Mme Kintzler, une intellectuelle de grande qualité et par là-même entendue et écoutée, et je me suis étonné de votre silence quant à l’engagement humaniste de M. Mélenchon, je vous en ai fait part et vous avez aussitôt réagi par l’article élogieux « La gauche ose renouer avec les Lumières », et je vous en suis reconnaissant. Mais, n’était-il pas un peu tard pour le faire ? Ne vous êtes pas demandé, si vous l’aviez écrit plus tôt, de quel côté serait le demi-million de voix qui nous a manqué ? Car face au déferlement médiatique stupide et à charge que la France Insoumise a subi, il est bien évident qu’un petit texte argumenté, et signé d’un des meilleurs philosophes français, représente une autorité bienveillante et rassembleuse, face aux accusations récurrentes à l’envi de « dictateur » ou de « diable rouge », ou face à la volonté délibérée de confondre notre programme avec celui du front national en y cherchant « les plus troublantes similitudes ». Nous aurions eu ainsi davantage de temps pour faire connaître votre article valorisant à tout le monde, et notamment pour rassurer les personnes trop facilement sous influence des médias. (Je m’en suis d’ailleurs servi sans vergogne à la dernière réunion publique que j’ai menée à Wissembourg, le 20 avril, en citant copieusement mes sources, en « bon » étudiant de philosophie, que je suis encore parfois.)
Que représentent d’ailleurs ces quelques lignes bien écrites pour vous, comparées aux centaines et centaines d’heures à battre la campagne par chacun de ces centaines et centaines de citoyens qui ont croisé des milliers de personnes, échangé des centaines de poignées de mains reconnaissantes ou simplement émues, après des échanges argumentés, ou ont encore essuyé d’un revers de main les crachats que leur enthousiasme encore naïf de jeune militant recevait métaphoriquement ou non dans leur visage ? De quel droit osez-vous dire « inespéré » ? Si les scores du front national ne sont pas aussi élevés qu’ils étaient annoncés, alors que d’habitude ils sont toujours en-dessous de la réalité, permettez-moi de vous dire que c’est bien parce que que c’est nous, les Insoumis, qui sommes à la cause même de cette nouvelle réflexion, cette inflexion dans un électorat souvent méprisé, presque toujours malheureux, rageur et impuissant. Et que c’est notre engagement militant, réfléchi, les mains dans le cambouis, qui a réussi cette prise de conscience chez « les gens », d’extrême droite, de droite, …, de tous horizons politiques. Aucun autre mouvement ou parti ne peut se prévaloir de cette générosité dont nous avons fait montre, et que nous comptons entretenir, faire croître, et promulguer aussi durant et après les prochaines législatives, si les irrégularités de scrutin ne sont cette fois plus légion.
Par votre billet, appuyant le lycéen Mélenchon, vous étiez le trait, trop tardif, de l’universitaire, tandis que j’étais l’archer qui a pu lui faire atteindre, certes un peu tard, avec son arc de fortune, la cible voulue. Et Victor Hugo a dû voir en analogie, ce « vaste réseau d’ateliers intellectuels, […] mêlant leur rayonnement sur la surface du pays, éveillant partout les aptitudes et échauffant partout les vocations. » (La Liberté de l’enseignement, 15 janvier 1850.)
Car ce travail un peu maladroit que font les Insoumis en ces temps d’obscurantisme ultra-libéral, et que je défends certes avec prétention mais conviction j’espère, c’est un peu celui des maîtres d’école ou des enseignants, aujourd’hui défaillants.
2ème point : Vous accusez sans détours M. Mélenchon « d’entrer dans une zone d’obscurité douteuse »
en « renvoyant dos à dos Le Pen et Macron, et en ne suggérant (je ne parle même pas de « donner ») aucune indication de vote ».
Il est vrai que pour les philosophes, ne compte que l’explicite. Toujours être explicite, à tout moment.
Vu l’énergie et la volonté déployées par M. Mélenchon depuis de longues années et le combat acharné qu’il voue sans compter contre le front national, et les combats récents, je pense qu’on aurait pu pour une fois, après la mauvaise nouvelle en cours, lui accorder le bénéfice de l’implicite, le temps qu’il reprenne son souffle. Mais vous avez raison d’exiger de lui, ce que l’on n’exige d’aucun autre candidat. Soit. Revenons au manque d’explicite et donc de cette obscurité.
Vous vous attendiez sans doute à un appel sans détours à battre la candidate Lepen en ralliant le candidat Macron.
Faut-il rappeler que depuis plus d’un an, les Insoumis ont fait toute leur campagne en disant très explicitement qu’il n’y aurait aucun appel à voter pour qui que ce soit d’autre qu’eux pour le second tour ? Ce fut même un argument pour voter d’emblée France Insoumise, tant il est vrai qu’avec elle au second tour, le front national était sûr de ne pas l’emporter. De très nombreux Insoumis l’ont dit à qui voulait l’entendre : nous voterons France Insoumise aux deux tours, même si notre candidat n’y est plus. C’est notre engagement de pureté.
(Nous présentons d’ailleurs à cet effet aux législatives des gens du peuple, sans casseroles et sans tambouilles ,pour les 5/6 qui ne sont pas des élus, afin de renouveler l’oxygène de l’Assemblée Nationale, que nous trouvons plutôt souvent viciée.)
Comment M. Mélenchon, déjà ourdi par un résultat calamiteux, qu’aucun Insoumis n’attendait, aurait-il pu parler au nom de tous les Insoumis (et non de tous les Français), sachant que sa parole ne valait pas plus que celle de n’importe quel Insoumis, étant le représentant de tous ? Nous ne sommes pas un parti avec un chef. Nous sommes un mouvement. En se refusant à toute indication, incitation ou consigne de vote, il fait honneur au mouvement qu’il représente, et fait confiance à l’intelligence et au discernement de chacun : la liberté de conscience. Mais vous avez bien saisi tout cela et compris qu’il subsistait un doute : venons-en au point crucial, celui pour lequel, vous poussez des cris d’orfraie à l’instar de la meute médiatique que vous dénoncez pourtant si souvent : quand même, « Marine Le Pen parle bien d’une alternance fondamentale », écrivez-vous.
Cela a toujours été très clair : nous appelons de la manière la plus ferme qui soit, à ne jamais voter pour le front national et cela a été dit lors de la conférence de presse du 26 avril.
Mais il est vrai que notre position a changé depuis 2002. : M. Macron représente également ce que nous combattons avec la plus grande sévérité également : le libéralisme économique poussé à sa position la plus extrême. Comment pourrions-nous en faire un combat moindre, quand on voit les dégâts que nous promet par exemple la loi El Kohmri appliquée par 49.3 : l’extrême souffrance au travail et les suicides revus à la hausse qui en découleront. Dès lors, si le néolibéralisme a pour principe le profit, et si le fascisme peut se définir comme « l’assujettissement de toutes les composantes de l’Etat à une idéologie totalitaire et nihiliste », comme le propose Manuela Cadelli dans cet article, http://www.lesoir.be/1137303/article/debats/cartes-blanches/2016-03-01/neoliberalisme-est-un-fascisme
comment ne pas voir qu’en érigeant l’austérité comme règle et valeur première, on détruit du même coup toutes les valeurs humanistes, comment ne pas voir en M. Macron une nouvelle forme de fascisme : un fascisme néolibéral, qui ne serait pas certes « anti »libéral, mais « ultra »libéral ?
J’ajouterais que la montée du front national, ce par quoi il se nourrit et se développe depuis au moins trente ans n’est pas moins que ce néolibéralisme destructeur, car il entretient volontairement un chômage de masse et une situation continue de crise financière. Le second tour Macron-Lepen a été magistralement orchestré depuis plus d’un an et s’il a fonctionné, alors que nous n’avons fait que le dénoncer, c’est bien que les consciences individuelles ont été lobotomisées à l’envi.
On connaît néanmoins par l’histoire, la réalité du fascisme dont s’inspire le front national, c’est pourquoi la France Insoumise invite à ne JAMAIS voter pour Mme Lepen.
Mais faudra-t-il vivre un enfer kafkaïen aussi dur que ce que nous avons déjà connu par le passé pour rompre aussi radicalement avec les politiques comme celles de M. Macron ?
Il peut donc apparaître logique de laisser à chaque Insoumis sa liberté de conscience pour savoir s’il votera ou non pour M. Macron, s’abstiendra, votera blanc ou Mélenchon au second tour.
La France Insoumise laissera libre chacun de son choix, et de le divulguer ou non et que cela plaise aux « bien-pensants » ou non.
Ce commentaire expose bien le raisonnement d’un militant engagé de la France insoumise.
Il m’est reproché de ne pas être moi-même une militante engagée – ou plutôt, ce qui aggrave mon cas, de ne pas être une intellectuelle organique dont le rôle eût été de lancer le bon appel au bon moment.
Ce reproche est justifié : je ne suis pas une intellectuelle organique. J’ai réagi au discours de JLM à Toulouse du 16 avril, et sur des points précis. C’est en effet ce discours qui m’a fourni la substance de mon billet, et non une décision générale de militer pour JLM, car dans ce cas j’aurais pris l’initiative bien plus tôt.
On voit bien que le poids accordé à la parole intellectuelle par toute organisation politique est apprécié à l’aune d’une finalité qui lui est extérieure, jugé en fonction d’un service rendu (ou non). Je ne consens pas à cette hétéronomie, c’est cela qui m’est reproché à juste titre – mais même si je m’y soumettais, je n’aurais pas l’outrecuidance de penser que quelques lignes de ma main puissent se traduire en centaines de milliers de voix !
J’ai parlé de « résultat inespéré » oui, car allant bien au-delà de ce que laissaient espérer les estimations en début de campagne. Là encore, je n’adopte pas celles des militants engagés…
Quant au second point : « nous n’appelons pas à voter pour le FN » (ouf!), mais « M. Macron représente également ce que nous combattons […] » (c’est moi qui souligne). En quoi consiste cette égalité ? On l’apprend 3 lignes plus loin : « une nouvelle forme de fascisme ». Il y a là une identification que je n’accepte pas : au motif que le programme de Macron doit être combattu, on fait comme si le champ politique dans lequel il se situe était homogène par nature à celui de Le Pen.
De l’oppression engendrée par un programme de libéralisme économique on ne peut pas conclure à la forme politique fasciste de cette oppression. On ne saurait combattre Macron sur les mêmes fondements que l’on combat Le Pen (c’est entre autres pour ces mêmes raisons qu’il est profondément impertinent de comparer le programme de la France insoumise à celui de Le Pen). Je persiste à penser qu’il y a des priorités à maintenir ici – entre « les désaccords » qui prennent place dans un champ politique où l’opposition a un sens et « le pire » qui précisément refuse par principe tout désaccord (et force les désaccords à prendre d’autres formes que politiques), je choisis le champ des désaccords en tant qu’il est un champ politique.
Que cette tenaille électorale puisse être, parallèlement, une machine à reconduire finalement les politiques néolibérales, je ne le conteste pas ! Reste à faire savoir que le choix forcé par cette tenaille n’a aucune valeur d’adhésion en termes de programme. Le discours que Macron a tenu le 26 avril à Arras montre qu’il en a conscience ; ce candidat n’a pas d’électorat fidélisé et se sait obligé d’évoluer sur des ruines embrasées qui peuvent lui être fatales une fois élu.
L’affrontement Le Pen/Macron n’a pas la fonction irénique consensuelle que l’on a connue par exemple en 2002 avec Le Pen/Chirac, fonction d’étouffement des désaccords : il a pour effet de marquer le champ politique républicain comme devant être celui des désaccords. Et certes le combat mené par la France insoumise y est pour beaucoup. Mais encore faut-il désigner avec constance, jusqu’au bout (même lorsque la configuration électorale est insatisfaisante), ce champ comme distinct de celui d’une politique totalitaire qui par définition récuse le désaccord et le rejette hors champ politique. Voilà pourquoi je n’hésite pas à dire que au second tour je voterai Macron, avec lequel je suis en désaccord.
Bonjour,
Et si JLM était persuadé que de toutes façons, et quoiqu’il dise, ce sera Macron qui sera élu ? S’il pensait n’avoir pas besoin de clamer son aversion pour l’extrême droite pour que chacun en soit assuré ? Et s’il pensait que la politique que Macron mènera sans doute bientôt ne changera rien à la situation socio-économique qui explique sans doute en partie, le succès du FN ? Qu’elle ne fera même que l’empirer, apportant ainsi de l’eau au moulin de ce parti à part, qui n’échouera à cette élection que pour ainsi peut-être réussir la prochaine ?
Dans ces conditions, en donnant publiquement une consigne de vote ou même simplement son choix personnel , JLM demanderait plus ou moins explicitement à tous ceux qui ont confiance en lui, de faire comme lui. Certains qui l’ont suivi aujourd’hui, pourront alors peut-être lui reprocher cette prise de position publique et déplacer leur vote bien à droite…
Bonjour. Votre remarque repose sur une hypothèse fondamentale cachée : il y aurait homogénéité de champ politique entre Macron et Le Pen, homogénéité qui légitime la comparaison entre des progarmmes. C’est ce que je conteste (voir les réponses aux commentaires précédents).
Si j’ai bien compris vos propos, on aurait donc le choix entre le politique et son autre — la force, la violence pures. Mais il me semble que vos remarques reposent elles aussi sur une hypothèse cachée : le champ politique ne serait pas déjà un trompe-l’œil, une illusion, nous ne serions pas déjà passés, sans nous en apercevoir car les rituels rassurants restent en place, de la démocratie à la « post-démocratie » selon l’expression de Colin Crouch.
Le déficit démocratique de la « gouvernance » (le mot a son importance) européenne, les traités commerciaux contraignants négociés en secret et appliqués par défaut avant même de daigner en informer les « administrés », la mise sous tutelle du politique par les transnationales et la finance, tout cela s’est fait discrètement, en douceur. (Notons au passage que M. Macron est le plus européiste et le plus atlantiste des candidats).
Pas de couteaux entre les dents (le grand épouvantail précédent), ni de nuit de cristal ; pas d’images frappantes susceptibles de donner une forme à nos craintes. Que des personnalités « modernes », lisses, sympathiques, souriantes (de Tony Blair à Justin Trudeau) — donc « gentilles »? Car le récit qui nous est fait est systématiquement, surtout s’agissant des relations internationales mais pas exclusivement, celui d’un combat entre gentils et méchants (Saddam Hussein par ex.) assorti d’injonctions moralisatrices — autre forme de mort du politique (voir Georges Corm).
Il me semble que la prise en tenaille va bien au-delà de ce que vous évoquez : le désaccord est déjà neutralisé ou pour mieux dire étouffé (contourné lorsqu’il s’est exprimé au cours d’un référendum, évité grâce au recours à l’épouvantail pour les autres scrutins). Les media, aux mains des forbans, ne constituent pas un véritable espace de délibération (seuls demeurent le formatage et le divertissement).
Je crains que nous ne soyons confrontés au choix entre le risque (grave) du totalitarisme connu, identifié et l’aggravation du totalitarisme soft et non véritablement reconnu comme tel.
Revenons au Mélenchon du 23 avril, que ne dément pas la vidéo du 28. Et essayons de le comprendre.
De Mélenchon je récuse le personnage, le programme et le projet. Que cela soit clair.
Sous l’égide de la lettre phi, celle de la philosophie, Mélenchon s’adresse à « vous, les gens ». D’où sort cette expression ? « Les gens », c’est l’appellation de degré zéro que trouva le Parti communiste français quant il eut renoncé à celles de prolétariat puis de travailleurs et qu’il ne voulut pas utiliser celles d’électeurs et encore moins de citoyens. Quel sens lui donne Mélenchon ? Il le laisse entendre : c’est « l’humanité », sous la forme atomisée et aliénée qu’elle connaît à notre époque. Non sans condescendance, il se fait l’Instituteur de cette humanité-là.
Mais, tout d’un coup, le 23 avril, il quitte l’habit de lumière et le bon sourire. Il devient l’instituteur surpris et courroucé qu’il soit resté assez de « gens » pour placer MLP devant lui. Il va jusqu’à contester la réalité des résultats. Il retrouve l’arrogance et la colère du Penseur contrarié, qu’il y a au fond de tout maître penseur, celles qu’il opposait déjà à Cohn Bendit le soir de la primaire de la droite, le 27 novembre dernier, en lui demandant de ne plus le tutoyer et de l’appeler « M. Mélenchon », lui qui désormais ne parlait plus qu’à « M. Fillon ». Malgré toutes les protestations, il y a une psychologie du maître penseur qui peut réunir 50 000 personnes dans sa classe. Cohn Bendit, à la fin : « Vous vous prenez pour quelqu’un que vous n’êtes pas, Monsieur Mélenchon. »
Cependant… Le 23 avril, « M. Mélenchon » n’est pas qualifié, non plus que « M. Fillon », et on lui demande tout naturellement d’appeler à voter Macron. Il refuse. Et là, il y a quelques raisons, qui ne sont pas toutes à son déshonneur.
La manœuvre complexe et de longue portée, initiée depuis plusieurs mois par quelques personnes haut placées et anonymes, a parfaitement réussi. Elle mettait en jeu : la neutralisation du candidat de la droite, la destruction du PS entamée depuis plusieurs années, la création d’un personnage relais du Président (en appui, puis en remplacement), et la présence de Le Pen au deuxième tour. Dix jours avant le premier tour, il y eut un peu de panique chez les organisateurs : Mélenchon pouvait arriver au deuxième tour, au détriment de Le Pen. Il n’en fut rien.
Dès lors, il n’y a plus qu’à faire fonctionner le mécanisme éprouvé du vote anti Le Pen. Là encore, tout baigne, sauf avec Mélenchon. Pourquoi ?
Pour fonctionner, le système suppose la relégation durable d’environ 20% des citoyens votants. Ces gens-là ne sont pas éclairés, disent les éclairés. On les traite même chaque jour de fachos, bas du front, non-diplômés, incultes, imbéciles, connards, racaille, infréquentables, puants même… On juge qu’ils sont indignes de la République. Ils n’aiment pas cela… Ils votent donc pour MLP, et juste assez pour la qualifier. Parfait !
Or Mélenchon essaie de parler à « ces gens-là » et de les éclairer, de les arracher à Le Pen. Dans ce qui est encore une posture d’éclairé, il y a pourtant l’idée, juste, que 20% des citoyens ne peuvent pas être des bêtes ni les instruments d’une certaine politique. En lui demandant de voter Macron, on lui demande de renier l’idée de sa politique.
Il n’acquiesce plus à une certaine fourberie qui consiste à gauche, depuis Mitterrand, à faire monter les Le Pen puis à demander, la main sur le cœur des valeurs, de voter pour la vertu, l’intelligence et la culture. Beaucoup rappellent à Mélenchon qu’en 2002 il adhérait pleinement à la manœuvre, dans l’espoir cultivé au PS qu’on soutiendrait ainsi Chirac comme la corde le pendu. Maintenant il sait bien que l’essentiel c’est d’être élu. Catherine Kintzler a raison : on n’est pas dans une confrontation de programmes mais dans une bataille pour l’occupation du champ politique.
Peut-être est-ce la fin de la France insoumise. Mais l’exclusion méthodique des 20% de votants demeurera-t-elle, comme mode de pérennisation et de gouvernement d’une faction ? Ou bien Macron prendra-t-il les mesures et l’esprit propres à abolir cette exclusion ? Il faut poser ces questions.
Que faire au delà ? Je n’en sais rien. Mais Macron, une fois élu, pourrait peut-être commencer par l’école. Et pas seulement pour recruter des professeurs. Depuis 30 ans, avec les meilleures intentions, on s’évertue à mettre l’enseignement « au niveau des enfants des classes populaires ». Ce faisant, on les enferme d’avance dans les 20%. Disant cela, je n’apprends rien à Mezetulle.
Pierre Campion
Je réponds brièvement à Mme Kintzler.
« On voit bien que le poids accordé à la parole intellectuelle par toute organisation politique est apprécié à l’aune d’une finalité qui lui est extérieure, jugé en fonction d’un service rendu (ou non). »
Non, car l' »humanisme » de Mélenchon, qui par son discours de Toulouse renoue avec les lumières, vaut par son humanisme même (sur ce point précis de la liberté de conscience, même si j’estime qu’il existe d’autres traits d’humanisme dans son programme, l’urgence écologique par exemple qui conditionne y compris dans les détails, l’ensemble, j’essaierai peut-être de le dire dans un autre article) et non d’abord par une quelconque utilité.
Le poids de la parole intellectuelle n’est donc pas fonction de son utilité, mais de son adéquation à la vérité et c’est la marque de fabrique des Insoumis, qui n’admettent rien de personne, pensent par eux-même et décident ensuite individuellement quand la vérité est claire ou collectivement/individuellement quand elle reste difficile à percevoir intellectuellement, soit qu’elle soit confuse, soit qu’elle n’existe pas et reste donc à construire. En second temps, le poids de la parole intellectuelle (donc reconnue comme telle ou non dans un premier temps à l’aune de sa vérité et non de sa correspondance immédiate à des fins médiates) est relayée ou non par son utilité, pour la cause poursuivie.
Je reprends votre remarque :
« […] je n’aurais pas l’outrecuidance de penser que quelques lignes de ma main puissent se traduire en centaines de milliers de voix ! » Certes, mais cette parole relayée pendant trois mois dans les réseaux sociaux, dans les réunions publiques organisées sur l’ensemble du territoire (pas assez dans les petites villes et villages, et ça se voit nettement dans les résultats !) aurait permis une adhésion moins tardive et une communication par le bouche à oreille beaucoup plus vaste, qui aurait en partie éteint la dernière semaine des médias à charge contre Mélenchon et qui plaçait le candidat Macron en tête, pour une demande de vote utile dérisoire, inutile et , de notre point de vue (avec l’éclairage de la situation actuelle par nos propres experts), mensongère.
C’est en ce sens que l’instruction de tous doit redevenir la priorité nationale, afin que chacun soit en possibilité de penser par lui-même, en argumentant véritablement, le jour de ses 16 ou 18 ans.
J’estime aujourd’hui que nous ne pouvons plus seulement exercer notre devoir de citoyen, juste en exerçant notre métier (pour ma part, professeur des écoles et la pédagogie par objectifs depuis quarante ans laisse un véritable champ de ruines, avec des élèves de moins en moins capables, car privés de l’instruction la plus élémentaire et de la discipline nécessaire à l’acquisition du peu d’instruction qui leur est délivrée. Je suis bien évidemment sur ce point en parfait accord avec tous les articles publiés sur Mezetulle : pour continuer à bien enseigner (oui, j’ai cette prétention de bien enseigner et j’enseigne notamment la littérature en même temps que les fondements et les éléments) il est quand même incroyable que, moi-même le premier à réclamer des inspections éclairées, j’en suis venu à les refuser, et à refuser ce que demande mon inspecteur concernant mes élèves, à ne pas signer mon rapport et écrire : »Je me refuse à signer ce pseudo-rapport d’inspection, hautement mensonger, pour pouvoir continuer à bien enseigner » Les « pédagogos » ont pris position à quasiment tous les postes de responsabilité et essaient d’imposer leurs niaiseries, qui, par la force des choses, les nouveaux n’ayant plus guère d’anciens chevronnés, habiles et compétents, à prendre en modèles pour établir eux-mêmes leur propre critique, se sont peu à peu distillés dans l’école.), nous ne pouvons donc plus seulement exercer notre métier, être membre d’une ou deux associations sportives ou culturelles et voter une fois tous les cinq ans, si nous voulons que les choses s’améliorent.
Il faut nécessairement que le peuple se réapproprie le pouvoir politique en faisant acte de civisme dans nombreux de ses actes dans la vie même, comme cela est expliqué dans notre programme sur l’urgence écologique par exemple, (car si nous voulons ensuite « immédiatement » philosopher, il nous faut d’abord être vivants) et se poser la question de l’impératif kantien dans chacune de ses actions. Quel est le bien commun ? La notion d’éthique et de morale doit être au coeur de la vie politique même, d’où notre idée de la 6ème république, pour en finir avec les élus corrompus, qui ne poursuivent que leur intérêt personnel.
Vous dites aussi : « De l’oppression engendrée par un programme de libéralisme économique on ne peut pas conclure à la forme politique fasciste de cette oppression. On ne saurait combattre Macron sur les mêmes fondements que l’on combat Le Pen »
Je comprends parfaitement l’argument. Mais est-il vrai ?
Pour l’instant, et je dis bien pour l’instant, cette question n’est pas tranchée chez beaucoup de monde et chez de nombreux Insoumis.
Pour ma part, je comprends que l’acceptation de la xénophobie (pour ne pas dire racisme, mais s’il y a réellement racisme, comment se fait-il que l’appel de M. Mélenchon à essayer de faire disparaître le front national de la scène politique par la loi, n’ait eu aucun écho ? Comment se fait-il que ce parti ne soit pas INTERDIT ?), ne peut être mise sur le même plan que l’acceptation de la servitude (pour ne pas dire esclavage…) de M. Macron.
Ma question est la suivante : en quoi le racisme (à peine) dissimulé de Mme Lepen, n’est-il pas de même nature que l’esclavage (très dissimulé) de M. Macron ?
Il faut démontrer de façon très claire la différence de nature que vous énoncez. Elle ne va pas de soi dans l’esprit des gens et de nombreux insoumis.
Votre réponse aura un impact réel, soyez-en sûre, et sur plus d’une conscience !
La façon dont a été annoncé le second tour Macron-Lepen (depuis presque un an) a été finalement obtenu par des manipulations médiatiques qui n’auront jamais aussi scandaleuses et grotesques (et pourtant le résultat a quand même été celui voulu au départ, on se demande aussi dans quelles conditions de collecte et de publication des résultats).
A ce sujet vous dites encore : « J’ai parlé de « résultat inespéré » oui, car allant bien au-delà de ce que laissaient espérer les estimations en début de campagne. Là encore, je n’adopte pas celles des militants engagés… »
Sur quoi fondez-vous votre estimation en début de campagne ? Il n’y a rien de philosophique dans une estimation, surtout quand elle est fabriquée de toutes pièces par les intérêts financiers de ceux qui les commandent ! C’est avec toutes ces estimations que les élections sont en partie truquées et que les gens ont voté parfois et trop souvent en fonction d’elles.
Je m’en tiens à quelques points, au risque de lasser les lecteurs car nous commençons à « tourner en rond » et à ressasser.
Dans votre réponse vous donnez un exemple de la subordination de la parole intellectuelle à des finalités extérieures, en persistant à me reprocher de ne pas avoir écrit plus tôt l’article favorable à JLM , article que je n’ai précisément pu écrire, pour des raisons intellectuelles, qu’après avoir entendu le discours du 16 avril. Je ne pense pas – mais là je crois que nous pourrons être d’accord – qu’on doive apprécier le poids d’un texte ou d’une parole à son adéquation à « la vérité », car celle-ci n’est pas un objet extérieur de révélation auquel on pourrait se reporter, et demande qu’on travaille une position critique toujours à remettre sur le chantier. Pour ma part je préfère apprécier un texte en fonction de la force de réflexion qu’il réclame, qu’il exige aussi bien de son auteur que de son lecteur.
Une politique de dérégulation, de contractualisation (au sens où le contrat se substitue à la loi) tous azimuts, d’émiettement communautaire, etc., est une oppression et il faut la combattre. Une oppression à caractère fasciste, ainsi qu’une oppression totalitaire, n’a pas les mêmes propriétés politiques qu’une oppression ultra-libérale, elle ne recourt pas aux mêmes moyens et ses effets vont au-delà. Je pense avoir abordé la question dans les réponses aux commentaires précédents, notamment par le concept politique discriminant de conditions de possibilité des désaccords.
Je crains encore plus l’oppression à caractère fasciste et l’oppression totalitaire (à ce sujet il faut nommer clairement le totalitarisme islamiste et non le banaliser en parlant simplement de « criminels ») que l’oppression par la dérégulation. Ce faisant, je compare deux craintes et je me livre, comme le veut cette tenaille électorale, aux passions tristes. Je ne veux pas prendre le risque de favoriser le nombre de bulletins Le Pen par une abstention ou un bulletin nul, c’est aussi bête que cela.
Vous dites que la question n’est pas tranchée chez les « Insoumis ». On pourrait aussi, en restant rivé au petit bout de la lorgnette et aux passions tristes, penser que l’attitude de JLM ménage la suite (législatives) en termes de calcul électoral… Mais à mon avis ce calcul prend actuellement un risque qui excède la dénonciation de la tenaille électorale : celui de faire monter Le Pen.
J’ai raisonné en fonction d’estimations. Le résultat de JLM au 1er tour a effectivement été un démenti éclatant des estimations, et cela n’a pas été une mince conquête que de briser les apparences et les combines médiatiques ; je ne vois pas en quoi c’est mal de le dire. En matière de décision en vue d’un scrutin, ce sont néanmoins des éléments entrant dans le calcul. Il n’y a rien de philosophique dans des apparences et des combines, mais il peut être philosophique de les examiner.
Pierre Campion, s’il vous plaît éclairez la non-initiée que je suis : que voulez-vous dire par « La manœuvre complexe et de longue portée, initiée depuis plusieurs mois par quelques personnes haut placées et anonymes, a parfaitement réussi » ? qui sont ces « quelques personnes… » ? Je trouverais sûrement la réponse en m’immergeant dans les réseaux sociaux ou en me prenant la tête, mais je préfère que vous m’épargniez cette peine.
Bonjour Madame Favret-Saada.
C’est une conjecture formée non d’après les réseaux sociaux mais dans l’observation personnelle d’événements complexes et en partie obscurs. Je n’ai pas de noms. Si mon propos a pu vous laisser en espérer, je regrette de vous décevoir…
M. Pena-Ruiz ne semble pas partager les craintes d’une montée artificielle de Mme Lepen pour ce second tour et n’appelle pas quant à lui à l’artifice du front républicain :
http://www.liberation.fr/debats/2017/04/30/ne-nous-soumettons-pas_1566100
Voir ci-dessous la réponse de Jeanne Favret-Saada à laquelle je souscris.
Il est possible, à coups de citations d’articles et d’éditos, de se renvoyer la balle maintes et maintes fois. Voir par exemple l’édito de Riss dans Charlie-Hebdo de ce mercredi 3 mai, voir l’article que je viens de mettre en ligne ce matin « Oser bêtement un bulletin Macron : tenaille ou chantage ?« . Etc.
Cela signifie seulement que deux citoyens peuvent à la fois adhérer à la laïcité et avoir deux opinions différentes sur le danger représenté par Le Pen. Si « la laïcité » ordonnait tous nos choix d’un seul coup d’un seul, je me méfierais.
Il y a une hierarchie des valeurs et pour l’avoir oublié Méluche rejoint la force obscure…..
Je n’irai tout de même pas jusque-là… il ne s’agit pas d’un soutien au sens positif du terme.
Il me semble que la question est ailleurs : le calcul politique l’emporte ici (ambition de réunir la seule, la vraie, l’authentique force d’opposition « de gauche ») et fait qu’on se décharge sur le vote des autres pour avoir les mains propres (on s’en lave les mains…) et pour passer à la case suivante.